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Page:Chronique de Guillaume de Nangis.djvu/364

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DE GUILLAUME DE NANGIS

Chrétiens, ou du moins de les faire devenir lépreux comme eux, et ils voulaient étendre un si grand forfait sur toute la France et l’Allemagne. On dit, pour plus grande confirmation de la vérité de ces bruits, que vers ce temps le seigneur de Parthenay écrivit au roi, sous son seing, les aveux d’un des plus considérables lépreux qu’il avait pris dans sa terre. Il avait, dit-on, confessé qu’un riche Juif l’avait entraîné à commettre ces crimes, lui avait remis le poison, donné dix livres, et promis de lui fournir beaucoup d’argent pour corrompre les autres lépreux. Comme on lui eut demandé la recette de ces poisons, il répondit qu’ils se faisaient avec du sang humain et de l’urine, et trois herbes dont il ne savait pas ou ne voulut pas dire le nom. On y plaçait, disait-il, le corps du Christ, et lorsque le tout était sec, on le broyait et réduisait en poudre ; alors le mettant dans des sacs, attachés avec quelque chose de lourd, ils le jetaient dans les puits et dans les sources. Nous avons vu aussi de nos propres yeux, dans notre ville, dans le Poitou, une lépreuse qui, passant par là, et craignant d’être prise, jeta derrière elle un chiffon lié, qui fut aussitôt porté à la justice. On y trouva une tête de couleuvre, les pieds d’un crapaud, et comme les cheveux d’une femme infectés d’une espèce dé liqueur très-noire et fétide, en sorte que c’était aussi dégoûtant à voir qu’à sentir. Tout cela jeté dans un grand feu allumé exprès ne put aucunement brûler, preuve manifeste que c’était un poison des plus violens. Le roi, apprenant ces faits et d’autres de cette sorte, s’en retourna précipitamment en France, et manda partout son royaume qu’on emprisonnât les lépreux, en attendant