Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/169

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font descendre du ciel sur la terre. Oui, ce sont ces ornements qui méritent le nom de chaînes ; les chaînes de Paul, au contraire, sont des ornements véritables. Ces colliers courbent l’âme et le corps à la terre, tandis que les chaînes de Paul sont une parure pour l’âme et pour le corps à la fois. En voulez-vous la preuve ? Dites-moi : de vous ou de Paul, quel est celui qui attirera le plus de regards ? Mais que dis-je ? L’impératrice elle-même, toute resplendissante d’or, ne serait pas un spectacle plus attrayant que Paul. Que Paul, chargé de fers et que l’impératrice entrent en même temps dans une église, tous les yeux se détourneront de l’impératrice, pour se fixer sur Paul, et ce sera justice. N’est-il pas plus curieux en effet de voir un homme supérieur à la nature humaine, un homme qui n’a rien d’humain et qui est un ange sur la terre, que de voir une femme parée ? Une femme parée ! Mais cela se voit partout, au spectacle, aux bains, à la procession. Un homme chargé de chaînes, au contraire, qui, en même temps, loin de se courber sous le poids de ses fers, y trouve son plus bel ornement, voilà un spectacle qui n’a rien de terrestre et qui est digne du ciel ! L’âme de cette créature entourée d’ornements terrestres fait attention à ceux qui la regardent ou qui ne la regardent pas : elle est pleine d’orgueil, elle est en proie aux inquiétudes et aux soucis, elle a pour liens des passions sans nombre. Mais, grâce à ses chaînes, Paul se trouve exempt d’orgueil et rempli d’allégresse ; libre de toute inquiétude, il lève vers le ciel des regards joyeux. Si l’on me donnait le choix, qu’est-ce que je préférerais, de Paul apparaissant et parlant du haut des cieux, ou de Paul apparaissant et parlant dans sa prison ? J’aimerais mieux voir Paul m’apparaître du fond de sa prison ; car c’est dans sa prison que les anges viennent le visiter. Les chaînes de Paul suspendent ses auditeurs à ses lèvres et servent en même temps de base à sa prédication. Tâchons donc d’en obtenir de semblables.
5. Pour cela, que faut-il faire ? Il faut briser et broyer ces colliers, ces ornements mondains. Ce sont des liens inutiles et même pernicieux, qui seront là-haut les marques de notre servitude. Ce sont les chaînes de Paul qui nous délivreront des chaînes du monde. La femme qui est chargée de ces chaînes mondaines, sera un jour condamnée à une prison éternelle et jetée dans un cachot, pieds et poings liés. Celle qui aura été chargée des liens de Paul, les portera autour d’elle comme une parure. Délivrez donc votre corps de ses liens, et le pauvre de la faim. Pourquoi river les fers dont le péché vous entoure ? Comment donc, direz-vous, puis-je river ces fers ? Eh ! quoi ! Porter de l’or, quand votre semblable meurt de faim, vous charger d’or pour satisfaire votre vanité, quand votre semblable n’a pas de quoi manger, n’est-ce pas river les chaînes dont vous charge le péché ? Revêtez-vous du Christ et non de cet or ; le Christ n’est pas où est le mammon d’iniquité, le mammon d’iniquité ne peut être où est le Christ. Ne voulez-vous donc pas vous revêtir du Roi de l’univers ? Si l’on vous donnait la pourpre et le diadème, n’aimeriez-vous pas mieux un tel présent que de l’or ? Et moi, ce ne sont pas les insignes de la royauté, c’est le roi en personne que je vous donne pour ornement. Comment donc, dites-vous, peut-on se revêtir du Christ ? Écoutez cette parole de Paul : « Vous tous qui avez été baptisés en Jésus-Christ, vous avez été revêtus de Jésus-Christ ». (Gal. 3,27) Écoutez ce conseil de l’apôtre : « Ne cherchez point à contenter votre sensualité, en satisfaisant à ses désirs ». (Rom. 13,14) On peut donc se revêtir du Christ, en ne cherchant point à contenter sa sensualité. Et quand on sera revêtu du Christ, on fera reculer le démon. Mais si l’on se revêt d’or, on deviendra un objet de risée même pour les hommes auxquels on imposerait le respect, en se revêtant du Christ.
Voulez-vous paraître belle et séduisante ? Contentez-vous de la parure naturelle que vous a donnée le Créateur. A quoi bon cet or et ces ornements qui affichent la prétention de corriger ce que Dieu a fait ? Voulez-vous paraître belle ? Revêtez-vous de charité, de bonté, de modestie, de pudeur, et dépouillez le faste. Les ornements que je vous indique sont plus précieux que l’or ; ils ajoutent à la beauté et changent en beauté la laideur même. Quand on voit la beauté jointe à la bonté, on est prévenu en sa faveur ; mais une méchante femme perd toute sa beauté ; car sa méchanceté choque les yeux de l’âme qui ne la voient plus telle qu’elle est physiquement. L’Égyptienne, femme de Putiphar, était parée, ainsi que Joseph ; lequel des deux était le plus beau ? Et notez bien que je