Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/209

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dans toutes les afflictions et dans tous les maux qui nous arrivent, votre foi nous fait trouver notre consolation en vous ; que nous vivons maintenant, si vous demeurez fermes dans le Seigneur ». Où trouver l’égal de ce Paul qui regardait le salut du prochain comme son propre salut, qui était, à l’égard de tous, ce qu’est le corps pour ses membres ? Qui nous fera entendre aujourd’hui un pareil cri de l’âme ? Ou plutôt, qui concevra jamais un pareil sentiment dans son cœur ? Il ne pensait pas que les fidèles dussent lui savoir gré des épreuves qu’il acceptait pour eux, mais c’est lui qui leur savait gré de ce que ses épreuves à lui n’ébranlaient pas leur constance ; il a l’air de leur dire : C’est pour vous plus que pour nous, que les épreuves sont dangereuses ; vous êtes plus éprouvés, vous qui ne subissez pas les souffrances, que nous qui les subissons. Mais depuis que Timothée, dit-il, nous a apporté ces bonnes nouvelles, nous ne sentons plus rien de nos douleurs, mais, « dans toutes les afflictions, votre foi nous fait trouver notre consolation » ; et non seulement dans toutes les afflictions, mais « dans tous les maux qui nous arrivent », dit-il, et avec raison. Car un bon maître est au-dessus de toutes les douleurs, tant que ses disciples s’avancent au gré de ses désirs. C’est par vous, dit-il, que nous sommes consolés ; ce qui veut dire, c’est vous qui nous fortifiez. Assurément c’était tout le contraire ; car le courage qui triomphe des souffrances, qui résiste avec fierté, un pareil exemple suffisait bien pour affermir les disciples. Mais l’apôtre voit, dans le sens opposé, l’édification qu’il raconte, il transporte l’éloge aux disciples : c’est vous, dit-il, qui avez répandu sur nous l’huile fortifiante, c’est vous qui nous avez permis de respirer, c’est vous qui nous avez enlevé le sentiment de nos souffrances. Et il ne dit pas Nous respirons, ni, nous sommes consolés, mais que dit-il ? « Que nous vivons maintenant » ; il montre par là qu’il n’y a pour lui d’autre épreuve, d’autre mort que le scandale qui provoquerait leur chute, puisque ce qu’il regarde comme sa vie, c’est leur avancement. Quel autre a jamais exprimé ainsi, ou sa douleur de la faiblesse de ses disciples, ou la joie qu’ils lui causent ? Il ne dit pas : Nous nous réjouissons, mais, « nous vivons », marquant par là la vie à venir.

3. C’est que, sous cette espérance, la vie même n’est pas une vie pour nous. Voilà quels doivent être les sentiments des maîtres, ceux des disciples ; et nul n’aura jamais à s’en repentir. L’apôtre développe ensuite cette pensée ; voyez, écoutez : « Car quelles actions de grâces pouvons-nous rendre assez dignement à Dieu, à cause de vous, pour toute la joie dont nous tressaillons, à cause de vous, devant notre Dieu ; nuit et jour, le conjurant avec ardeur, pour qu’il nous soit donné de voir votre visage, afin d’ajouter à ce qui peut manquer encore à votre foi (9, 10) ? » Non seulement, dit-il, c’est la vie que nous vous devons, mais nous vous devons aussi une joie si grande, que nous ne pouvons pas en rendre à Dieu de dignes actions de grâces. Votre perfection, nous la regardons, dit-il, comme un présent divin ; vous nous avez fait tant de bien, que nous pensons que ce bien nous vient de Dieu, ou plutôt que c’est l’œuvre de Dieu ; car ni l’âme humaine, ni l’ardeur de tout le zèle humain ne sauraient rien produire de pareil. « Nuit et jour », dit-il, « le conjurant avec ardeur ». Encore des expressions où la joie éclate. Supposez un agriculteur qui entend dire que la terre arrosée de ses sueurs est chargée de fruits ; il lui tarde de voir de ses propres yeux ce qui le remplit d’une joie si vive ; c’est ainsi que Paul brûle de voir la Macédoine. « Le conjurant avec ardeur », voyez combien c’est expressif ; « pour qu’il nous soit donné de voir votre visage, afin d’ajouter à ce qui peut manquer encore à votre foi ».

Ici, une question qui demande assez d’explications. Si vous vivez maintenant, parce que les fidèles sont solides, si Timothée vous a apporté les bonnes nouvelles de leur foi et de leur charité, si vous en avez été rempli d’une joie si vive, qu’il vous est impossible d’en rendre à Dieu de dignes actions de grâces, comment vous avisez-vous de parler de ce qui peut manquer encore à leur foi ? N’auriez-vous tout à l’heure fait entendre que des flatteries ? Nullement, gardons-nous d’en rien croire. L’apôtre a commencé par dire qu’ils ont soutenu nombre de combats, qu’ils n’ont pas été moins éprouvés que les Églises de la Judée. Qu’est-ce que cela signifie ? C’est qu’ils n’avaient pas eu pleine et entière communication de la doctrine, ils n’avaient pas appris tout ce qu’ils avaient à apprendre, ce que montre l’apôtre vers la fin de sa lettre. Peut-être y