Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/265

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jour ne viendra point que l’apostasie ne soit arrivée auparavant, et qu’on n’ait vu paraître l’homme de péché, cet enfant de perdition, cet ennemi de Dieu qui s’élèvera au-dessus de tout ce qui est appelé Dieu, ou qui est adoré, jusqu’à s’asseoir dans le temple de Dieu, voulant lui-même passer pour Dieu (3, 4) ». Il parle ici de l’antéchrist, et il découvre de grands mystères. Qu’est-ce que « l’apostasie ? » C’est l’antéchrist qu’il entend par l’apostasie, parce que l’antéchrist doit en perdre un grand nombre qui feront défection. « Jusqu’à séduire, s’il était possible », dit l’Évangile, « les élus mêmes ». (Mat. 24,24) Il l’appelle de plus « l’homme de péché », car il en fera d’innombrables, et en fera faire aux autres de terribles ; il l’appelle de plus « cet enfant de perdition », parce qu’il faut que lui-même périsse. Maintenant, quel est-il ? Serait-ce Satan ? Nullement, mais un homme entreprenant l’œuvre entière de Satan. « Et qu’on n’ait vu paraître cet homme », dit le texte, « qui s’élèvera au-dessus de tout ce qui est appelé Dieu, ou qui est adoré ». C’est qu’en effet il ne conduira pas les hommes au culte des idoles ; mais ce sera un adversaire de Dieu ; il détruira tous les dieux, et il ordonnera qu’on l’adore lui-même, en place de Dieu ; et il siégera dans le temple de Dieu, non pas dans le temple de Jérusalem, mais dans le temple de l’Église, « voulant lui-même passer pour Dieu ». L’apôtre ne dit pas : Se disant Dieu, mais : Essayant de passer pour Dieu. Car il fera de grandes œuvres et montrera des signes admirables. « Ne vous souvient-il pas que je vous ai dit ces choses lorsque j’étais encore avec vous (5) ? »
3. Comprenez-vous la nécessité de répéter ces choses, et de les reproduire dans les mêmes termes ? En effet, ces fidèles à qui il avait donné de vive voix ces conseils, se trouvèrent avoir encore besoin d’avertissements. C’est ainsi qu’après l’avoir entendu parler sur les afflictions : « Car », dit-il, « lorsque nous étions parmi vous, nous vous prédisions que nous aurions des afflictions à souffrir » (1Th. 5,4), ils oublièrent de même ces paroles, et on le voit forcé de leur écrire pour leur rendre la fermeté. De même, après l’avoir entendu parler sur l’avènement du Christ, ils eurent encore besoin de ses lettres pour se maintenir dans les voies de la sagesse. L’apôtre s’adresse donc à leur mémoire ; il leur montre qu’il ne dit rien de nouveau, qu’il ne fait que reproduire ce qu’il a toujours dit. Voyez les laboureurs, ils ne jettent qu’une fois la semence, mais elle ne réussit pas toujours, il faut beaucoup de culture et de soins, il faut creuser la terre et recouvrir les graines que les oiseaux mangeraient. C’est notre histoire ; si le souvenir continué ne préserve pas ce que l’on a jeté dans nos âmes, tout se dissipe dans l’air. Le démon nous ravit la semence ; notre négligence la perd, le soleil la dessèche, la pluie la supprime ; les épines l’étouffent. C’est pourquoi il ne suffit pas de la jeter et de se retirer ; pour assurer le fruit, grand besoin est d’assiduité ; il faut chasser les oiseaux ; il faut retrancher les épines ; il faut amasser de la terre sur le sol pierreux ; il faut écarter, enlever tout ce qui est nuisible.
Mais, en ce qui concerne la terre, toute la tâche appartient à l’agriculteur, parce que la terre est inanimée, elle n’est que passive ; en ce qui concerne notre terre spirituelle, il en est tout autrement, tout ne dépend pas uniquement des docteurs et des maîtres. Si ce n’est pas la plus grande partie de la tâche qui appartient aux disciples, c’en est au moins la moitié. A nous à jeter la semence ; mais à vous à faire ce qui vous est dit ; à montrer, par vos actions, les fruits de votre mémoire ; à arracher les épines jusqu’à la racine. Les épines, c’est l’amour de l’argent, passion stérile,.hideuse, qui ne produit que d’inutiles douleurs, importune à ceux qui l’éprouvent, et non seulement stérile, mais, de plus, contraire à toute fructification. Voilà ce que sont les richesses ; non seulement incapables de porter des fruits pour l’éternité, mais gênantes, embarrassantes pour quiconque voudrait porter de tels fruits. Ce sont des êtres sans raison qui se nourrissent d’épines, des chameaux ; aliment pour le feu, somptuosité inutile, voilà ce que sont les richesses ; absolument inutiles, ne servant qu’à – embraser la fournaise, qu’à faire brûler ce feu du dernier jour, qu’à alimenter la déraison et toutes les passions qui troublent l’âme, la haine, la rancune et la colère. Tel est aussi le chameau qui mange les épines. Les personnes expérimentées dans ces sortes de choses, disent que parmi les animaux, nul n’est plus irritable, d’une colère plus méchante, nul n’est plus vindicatif que le chameau, tel est l’effet des richesses ; elles nourrissent le délire des passions. Quant