Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/316

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barrières, nous ne serons point pour cela exempts par la suite de nombreuses peines ; mais l’habitude prise deviendra désormais une loi. Ne leur permettons donc point de rien faire de séduisant et de pernicieux ; ne les flattons point comme des enfants ; prenons soin surtout de les maintenir dans la tempérance, car c’est par le vice opposé que la plupart du temps la jeunesse se corrompt. Là nous avons beaucoup à lutter, beaucoup à veiller. Marions-les de bonne heure, en sorte que leurs épouses les reçoivent chastes et purs ; ce seront là les amours les plus vives. Celui qui est plein de réserve avant le mariage le sera bien davantage après ; et celui qui, avant le mariage, a fréquenté les courtisanes, en fera de même quand il sera marié : « A l’homme débauché tout aliment est bon ». (Sir. 23,17) Les mariés portent des couronnes, symboles de la victoire, pour signifier qu’ils s’approchent du lit nuptial sans avoir été vaincus, et n’ont point cédé à la volupté. Mais celui qui s’y est lâchement abandonné, pourquoi porte-t-il une couronne, quand il est vaincu ?
Que les enfants donc soient exhortés, réprimandés, effrayés, menacés ; employons avec eux tantôt un procédé, tantôt un autre. Nous avons en eux un grand dépôt. Pensons donc à eux et faisons tout pour que le démon ne nous les ravisse pas. Aujourd’hui nous faisons tout le contraire. Nous n’épargnons rien pour embellir un domaine et pour le confier à un homme fidèle ; nous cherchons l’ânier, le muletier, le gérant, l’intendant le plus dévoué ; mais, ce qui pour nous est le plus précieux, confier notre fils à un homme qui saura garder ses mœurs, nous ne nous en inquiétons point ; pourtant c’est là ce que nous avons de plus précieux ; c’est pour cela que nous avons reçu tout le reste. Nous pensons aux biens à acquérir pour nos enfants, et nous ne songeons point à eux-mêmes : comprenez donc quelle déraison ? Formez l’âme de votre enfant, et le reste vous sera donné par surcroît, tandis que, si son âme n’est pas vertueuse, vos richesses ne lui serviront de rien ; si au contraire elle est ce qu’elle doit être, la pauvreté ne lui portera nul préjudice. Voulez-vous le laisser riche après vous ? Apprenez-lui à être honnête ; car c’est ainsi qu’il pourra faire sa fortune, et s’il ne s’enrichit pas, il n’aura rien à envier aux riches. Mais, s’il est vicieux, quand vous laisseriez des millions, vous ne laisserez point un homme capable d’en être dépositaire, mais il resterait au-dessous de ceux qui sont descendus au dernier degré de la misère : pour des enfants sans frein, mieux vaut pauvreté que richesse. La pauvreté défendrait leurs mœurs, même malgré eux ; la richesse, le voulussent-ils, ne leur permet point d’être sages, mais les entraîne, les fait tomber, les précipite dans un abîme de maux.
Mères, dirigez avec grand soin vos filles, la garde vous en est facile ; veillez à ce qu’elles restent chez elles ; avant tout apprenez-leur à être prudentes, retenues, à mépriser les richesses, à ne point aimer la parure, et préparez-les ainsi au mariage. Vous serez ainsi non seulement leurs protectrices, mais celles des hommes qui doivent les épouser, et non seulement d’eux, mais de leurs enfants, et même de leurs descendants. Si la racine est saine, les rameaux se développeront, comme ils le doivent, et de tout ce bien vous recevrez la récompense. Agissons donc ainsi toujours pour sauver non pas seulement une âme, mais plusieurs âmes par une seule. La jeune fille doit sortir de la maison paternelle pour se marier, comme un athlète sort de la palestre, formée et exercée ; il faut que, par sa vertu, elle puisse transformer tout ce qui l’entoure, de même que le levain transforme toute la masse à laquelle on le mêle. Que ses enfants, encore une fois, méritent le respect par leur conduite régulière et sage, en sorte qu’ils soient loués de Dieu et des hommes. Qu’ils apprennent à dompter la gourmandise, à s’abstenir du luxe, à être économes et affectueux ; qu’ils apprennent à obéir. C’est ainsi qu’ils pourront procurer une grande récompense à leurs parents ; c’est ainsi que tout sera pour la gloire de Dieu et le salut de nos âmes, en Jésus-Christ Notre Seigneur, à qui gloire aux siècles des siècles. Ainsi soit-il.