Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/368

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prêtre. – Est-ce qu’aussi il n’a pas de plus que vous les travaux, les dangers, les combats, de chaque jour, et les pénibles soucis ? avec tout cela, comment pouvez-vous dire qu’il n’est pas meilleur que vous ? Et quand il ne serait pas meilleur, est-ce une raison pour que vous vous perdiez ? Ces paroles viennent d’un fol orgueil. D’où savez-vous qu’il n’est pas meilleur que vous ? – Mais s’il vole, direz-vous, s’il dépouille l’Église ? – D’où savez-vous cela, ô homme ? Pourquoi vous jeter vous-même dans le précipice ? Si quelqu’un vous dit : Un tel a revêtu la pourpre ; bien que vous en soyez instruit, vous vous bouchez les oreilles. Quoique vous puissiez prouver le contraire, vous vous retirez aussitôt, vous feignez de ne rien savoir, ne voulant pas courir un danger, superflu ; mais ici vous courez encore au devant. Ces sortes de paroles ne passeront pas sans qu’il en soit demandé compte. Écoutez ce que dit Jésus-Christ : « Je vous le déclare, toute parole inutile que les hommes auront dite, ils en rendront compte au jour du jugement ». (Mat. 12,36) Vous vous flattez d’être meilleur qu’un autre, et pour cette seule ; pensée d’orgueil, vous ne gémissez point, vous ne vous frappez point la poitrine, vous ne baissez pas les yeux, vous n’imitez pas le publicain ? S’il en est ainsi, vous vous êtes perdu vous-même, fussiez-vous réellement meilleur que tel ou tel. Êtes-vous meilleur ? taisez-vous, si vous voulez rester meilleur. Si vous parlez, tout est perdu. Si vous vous croyez meilleur, vous ne l’êtes pas ; si vous ne le croyez pas, vous avez beaucoup fait pour l’être. Si celui qui était pécheur se retira justifié pour avoir confessé ses péchés, que ne gagnera pas celui qui sans être un grand pécheur, se croira néanmoins tel ? Faites l’examen de votre vie. Vous, ne volez pas ; mais vous ravissez, mais vous extorquez, mais vous faites mille choses de ce genre.

Je ne dis pas ceci pour faire l’éloge du vol, loin de là, je déplore au contraire l’état de ceux qui s’en rendent coupables, s’il en est de tels parmi les ministres de l’Église ; ce que je ne crois pas. Le vol sacrilège est un crime dont on ne peut dire toute l’énormité. Mais je prends vos intérêts : je ne veux pas que toute votre vertu soit rendue inutile par vos médisances. Quoi de pire qu’un publicain ? Or, celui dont parle l’Évangile était réellement publicain et comme tel coupable de mille fautes. Et cependant, que le pharisien dise seulement : « Je ne suis pas comme ce publicain », et voilà aussitôt tout son mérite perdu. Et vous ; si vous dites : Je ne suis pas comme ce prêtre, un voleur sacrilège, comment ne perdrez-vous pas tout ce que vous avez de mérite ? Si je dis ces choses, et si je me crois obligé d’y insister, ce n’est pas que je m’intéresse à ces coupables, mais c’est que je crains que vous me perdiez tout le fruit de votre vertu en vous glorifiant vous-même et en condamnant les autres. Écoutez ce conseil de saint Paul : « Que chacun examine bien ses propres actions, et alors il trouvera sa gloire en lui-même, et non point en se comparant avec les autres ». (Job. 6,4)

4. Dites-moi, lorsque vous êtes blessé et que vous allez trouver le médecin, est-ce que vous négligez d’appliquer le remède et de panser votre blessure, pour vous occuper de savoir si le médecin a lui-même ou s’il n’a pas de blessure ? Et s’il se trouve qu’il en ait une, vous en inquiétez-vous ? Est-ce que vous négligez pour cela votre propre blessure ? Est-ce que vous dites : Il devrait n’être pas malade, étant médecin ? Puisqu’il se porte mal, tout médecin qu’il est, je laisse, moi aussi, ma blessure sans la soigner. La malice du prêtre sera-t-elle une excuse pour le fidèle ? Nullement. Le mauvais prêtre subira une peine proportionnée à sa malice, sans doute, mais vous aussi vous aurez le châtiment qui vous est dû et qui vous revient ; d’ailleurs le maître n’a que le rang du fidèle. « Ils seront tous enseignés par Dieu ; et on ne dira plus : Connaissez le Seigneur ; car tout le monde me connaîtra, depuis le plus petit jusqu’au plus grand ». (Jn. 6,45 ; Isa. 54,13 ; Jer. 31,34) – Pourquoi donc direz-vous : Préside-t-il ? Pourquoi occupe-t-il la place qu’il occupe ? – Cessons, je vous en conjure, de médire de nos pasteurs ; n’examinons pas maintenant ce qu’ils font, si nous ne voulons pas nous nuire à nous-mêmes. Examinons-nous nous-mêmes, et nous ne dirons du mal de personne. Souvenons-nous avec respect de ce jour où il nous donna le baptême. Quels que soient les vices d’un père, son fils les cache avec soin. « Ne vous glorifiez point », dit le Sage, « de ce qui déshonore votre père ; car ce n’est pas votre gloire, mais plutôt votre honte ». (Sir. 3,10) Quand même il manquerait de prudence, ayez de l’indulgence. Si cette parole a été dite des