Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/419

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HOMÉLIE II.

LA RAISON POUR LAQUELLE JE T’AI LAISSÉ EN CRÈTE, C’EST AFIN QUE TU METTES EN BON ORDRE LES CHOSES QUI RESTENT A RÉGLER, ET QUE TU ÉTABLISSES DES PRÊTRES DE VILLE EN VILLE, SUIVANT CE QUE JE T’AI ORDONNÉ ; NE CHOISISSANT AUCUN HOMME QUI NE SOIT IRRÉPRÉHENSIBLE, MARI D’UNE SEULE FEMME, ET DONT LES ENFANTS SOIENT FIDÈLES ET QUI NE SOIENT PAS ACCUSÉS DE DISSOLUTION, NI DÉSOBÉISSANTS. (I, 5, 6-11)

Analyse.

  1. Travaux auxquels se livraient les apôtres. – Devoirs des pasteurs.
  2. Portrait de l’évêque tel que le veut saint Paul. – Que saint Paul a eu plus de pouvoir que Platon et tous les philosophes.
  3. Combien est difficile le mépris des honneurs.
  4. Ce n’est pas l’honneur et la gloire de ce monde que l’on doit rechercher.

1. Toute la vie des anciens était en action et en lutte ; il n’en est pas de même de la nôtre, elle est pleine de négligence. Ceux-là savaient qu’ils avaient été mis au monde pour travailler en se conformant à la volonté du Créateur ; mais nous, il semble que : nous soyons nés pour manger, boire et vivre dans la mollesse, tant nous faisons peu de cas des choses spirituelles ! Je ne parle pas des apôtres seulement, mais encore de ceux qui sont venus après eux. Voyez-les donc parcourir tous les pays, et, se livrant tout entiers à cette occupation, vivre toujours sur la, terre, étrangère : on croirait qu’ils n’avaient pas de patrie sur la terre.

Écoutez ce que dit le bienheureux Paul : « La raison pour laquelle je t’ai laissé en Crète » : il semble que se distribuant le monde tout entier, comme ils eussent fait pour une seule maison, ils administraient ainsi toutes choses et étendaient leur vigilance à tous les lieux, l’un se chargeant de telle région et l’autre de telle autre. – « La raison pour laquelle je t’ai laissé en Crète, c’est afin que tu mettes en bon ordre les choses qui restent à régler ». Il ne prend pas un ton de commandement, : « Afin que tu mettes en bon ordre », dit-il. Voyez-vous comme il a l’âme pure de toute jalousie, comme il recherche partout l’intérêt de ses disciples, comme il ne se demande pas si c’est lui ou un autre qui gouvernera ? Là où il y avait le plus de dangers et de difficultés il allait en personne mettre les choses en ordre. Mais ce qui rapportait plus de gloire sans mériter autant d’éloges, il le confie à son disciple, j’entends par là l’ordination des évêques et toutes les autres choses qui avaient besoin d’être redressées, ou plutôt, pourrait-on dire, qui avaient besoin d’une plus grande perfection. – Que dis-tu, je t’en prie ? Il mettra en bon ordre ce qui t’est soumis, et tu ne regardes pas cela comme une honte ni comme un déshonneur pour toi ? Pas le moins du monde, car je ne pense qu’à l’intérêt de l’Église ; et que ce soit par moi ou par un autre que tout aille bien, peu m’importe. – Tels doivent être les sentiments d’un bon pasteur, il ne doit pas rechercher sa propre gloire, mais l’utilité de tous. – « Et que tu établisses des prêtres de ville en ville », cela veut dire des évêques, comme nous l’avons expliqué ailleurs. – « Suivant que je t’ai ordonné, ne choisissant aucun homme qui ne soit irrépréhensible ». – « De ville en ville », dit-il, car il ne voulait pas que toute l’île fût à la charge d’un seul, mais chacun devait avoir sa part de soucis et d’inquiétudes. En effet, la fatigue serait moins grande et les fidèles seraient gouvernés avec plus de sollicitude du moment qu’un seul maître ne se contenterait pas de parcourir un grand nombre d’églises, mais que chacune d’elles serait confiée à un évêque et embellie par ses soins.

« Ne choisissant aucun homme qui ne soit irrépréhensible, mari d’une seule femme, et dont les enfants soient fidèles, et qui ne soient pas accusés de dissolution, ni désobéissants ». Pourquoi nous offre-t-il ce portrait ? Il ferme la bouche aux hérétiques qui condamnent le mariage, en montrant que l’union des époux n’est point blâmable, et qu’elle est au contraire si honorable qu’un homme marié peut monter sur le siège épiscopal. Mais