Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/540

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comme celui qui volontairement et de grand cœur choisit la pauvreté. Est-ce possible ? oui, et j’affirme même, si vous voulez, que celui qui choisit cette pauvreté volontaire est plus riche qu’un roi. Car celui-ci a de nombreux besoins, des ennuis, des craintes, par exemple, pour ses convois militaires qui peuvent manquer ; celui-là, au contraire, jouit d’une quiétude parfaite, et loin d’éprouver mille craintes, n’en garde aucune. Or, dites-moi, quel est le vrai riche, de celui qui chaque jour est inquiet, qui pense, qui s’étudie à amasser encore et toujours, et qui craint de manquer un jour ; ou de celui qui n’amasse rien, à qui tout suffit et abonde, qui n’éprouve aucun besoin, car la vertu et la crainte de Dieu, et non l’argent, donnent une sainte confiance ? L’or possède même le privilège de vous asservir. « Les cadeaux et les présents », dit l’Écriture, « aveuglent les yeux des sages ; ils sont dans leurs bouches comme un frein qui empêche leurs arrêts et leurs réprimandes ». (Sir. 20,29)
Considérez comment Pierre, ce noble indigent, punit le riche Ananie. Car celui-ci n’était-il pas riche ; et celui-là, pauvre ? Or, écoutez-le parlant avec autorité et disant : « Est-ce bien à tel prix que vous avez vendu votre champ ? » et l’autre humblement répond : « Oui, c’est à ce prix ! » (Act. 5,10) – Mais, dites-vous, qui me donnera d’arriver à la hauteur de Pierre ? – Vous pouvez être aussi grand que Pierre, si vous voulez vous dépouiller de tout ce que vous avez. Semez, donnez aux pauvres, suivez Jésus, et vous serez un autre Pierre. – Mais comment ? car (me dites-vous) il a fait des miracles. – Est-ce donc là, répondez-moi, ce qui a rendu cet apôtre admirable ; et n’est-ce pas plutôt la pleine confiance qu’il a gagnée auprès de Dieu par la sainteté de sa vie ? N’entendez-vous donc pas Jésus-Christ déclarer « Ne vous réjouissez pas de ce que les démons vous obéissent ; si vous voulez être parfaits, vendez ce que vous avez et donnez-le aux pauvres, et vous aurez un trésor dans les cieux ? » (Mt. 19,20) Écoutez ce que dit Pierre lui-même : « Je n’ai ni or ni argent ; mais ce que j’ai, je te le donne ». (Act. 3,6) Ceci, voyez-vous, on ne l’a point, quand on a l’or et l’argent. – Mais, répondez-vous, bien des gens n’ont ni le don de Pierre, ni ceux de la fortune ! – C’est qu’ils ne sont pas pauvres de leur gré ; car tout pauvre vraiment volontaire, possède tous lesbiens. Encore qu’il ne ressuscite point les morts, encore qu’il ne redresse point les boiteux, il possède, et ce don vaut mieux que ceux du thaumaturge, il possède la confiance en Dieu. De tels pauvres entendront au grand jour ce bienheureux arrêt « Venez, les bénis de mon Père ! (Se peut-il quelque chose de meilleur ?) Possédez le royaume qui vous a été préparé dès la création du monde. Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger, et vous m’avez recueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade et en prison, et vous m’avez visité. Possédez le royaume qui vous a été préparé dès la création du monde ». (Mt. 25,34-36) Fuyons donc l’avarice et la cupidité, pour gagner le royaume des cieux. Nourrissons les pauvres, afin de nourrir Jésus-Christ, et de devenir les cohéritiers de ce Sauveur Jésus, Notre-Seigneur, avec lequel soient au Père et au Saint-Esprit, gloire, puissance, honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

HOMÉLIE XIX.


AYANT DONC, MES FRÈRES, LA CONFIANCE QUE NOUS ENTRERONS DANS LE SANCTUAIRE PAR LE SANG DE JÉSUS, PAR CETTE VOIE NOUVELLE QUI MÈNE A LA VIE, ETC. (X, 20, JUSQU’A 26)

Analyse.

  • 1. L’orateur résume les différences déjà trouvées entre le culte israélite et le culte chrétien, et conclut par nous commander la confiance, la foi pleine et entière, et les œuvres saintes. – Il nous recommande une sainte rivalité dans la pratique du bien, une grande droiture dans nos rapports mutuels.
  • 2. L’amour mutuel, plénitude de la loi, n’a qu’une règle : aimer son prochain comme soi-même. – Le pardon des injures est l’application de ce principe. – Nul ne voudrait se haïr : ne haïssons point nos frères. – Le Nouveau Testament et même l’Ancien nous donnent des exemples. – Aimer ses ennemis, c’est au fond s’aimer soi-même et centupler sa récompense.


1. « Ayez confiance », Paul peut nous parler ainsi quand il a montré la différence de pontife, de sacrifice, de tabernacle, de testament, de promesses ; différence très-grande en effet, puisque chez les Juifs tout cela est temporel, et chez nous, éternel ; que là tout s’efface et tombe ; ici, tout est permanent ; d’un côté, on voit la faiblesse ; de l’autre, la perfection ; des ombres et des figures enfin, en face de l’immuable vérité. Écoutez, en effet : « Ce n’est pas selon la disposition d’une loi charnelle, c’est en vertu de sa vie immortelle » que Jésus est prêtre, nous dit-il ; ajoutant qu’il est écrit ailleurs : « Vous êtes prêtre pour l’éternité » voilà déjà la perpétuité du sacerdoce. Quant au testament, « celui-là », dit-il, « est ancien ; or ce qui passe et vieillit, va bientôt finir ». (Héb. 7,16 ; VIII, 13) – Le Nouveau possède la rémission des péchés : l’autre n’a rien de semblable : « Car la loi », nous dit-il, « n’a rien mené à perfection ». (Héb. 7,19) Et encore : « Mon