Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/573

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pour les seconds elle s’armait comme un ennemi.
2. « C’est par la foi que les murailles de Jéricho tombèrent par terre, après qu’on en eût fait le tour sept jours durant (30) ». Car le son des trompettes, quand même il retentirait pendant dix siècles, ne peut renverser des murailles ; tandis qu’à la foi rien n’est impossible. Vous voyez que la foi varie ses œuvres, non d’après notre logique ou selon les lois de la nature ; mais qu’elle opère toujours contre toute attente. Donc maintenant encore, tout arrive contre vos prévisions. Saint Paul voulait de toutes manières les amener à croire aux espérances à venir ; son discours tout entier n’a pas d’autre but ; il veut montrer que non seulement aujourd’hui, mais que dès le commencement, tous les miracles sont nés de la foi et se sont opérés par elle.
« C’est par la foi que Rahab, femme débauchée, ne périt pas avec les incrédules, parce qu’elle avait reçu et sauvé les espions de Josué (31) ». Il serait honteux qu’on vous vit plus incrédules qu’une femme perdue. Or elle a entendu ces espions et leurs prophéties, et aussitôt elle y a cru ; et sa foi eut son effet : tous les autres périrent, elle seule fut sauvée. Elle ne s’est pas dit : Je partagerai le sort de ta multitude, où j’ai les miens d’ailleurs. Et puis, suis-je donc plus sage que tant d’hommes intelligents qui ne croient point, tandis que j’ose croire, moi ! Non, elle n’a ni dit ni fait comme aurait agi ou parlé probablement tout autre à sa place : elle a cru simplement aux espions et à leurs affirmations.
« Que dirai-je davantage ? Le temps me manquera pour continuer ces récits (32) ». L’apôtre désormais ne s’appesantira plus sur des citations nominatives ; terminant par cette femme perdue dont l’exemple suffit pour couvrir les Hébreux d’une honte salutaire, il n’étend plus ses récits, de crainte d’allonger sans mesure son discours ; mais il n’abandonne pourtant pas les exemples, tout en les parcourant avec une extrême sagesse, et évitant ainsi avec soin un double écueil : celui d’ennuyer par la satiété, et celui de supprimer de nombreuses et fécondes leçons. Il ne se tait donc pas tout à fait ; mais il se garde de fatiguer par son discours : il remplit donc un double but. Car lorsqu’on discute avec énergie, si l’on continue quand même et toujours ce genre agressif, on assomme l’auditeur déjà convaincu, en lui jetant ainsi l’ennui, sans compter que l’on s’expose à passer pour un homme vain que, l’envie de briller fait parler, et non pas le seul désir d’être utile, comme cela doit être.
« Que dirai-je donc ? s’écrie-t-il. Le temps me manquera si je veux parler de Gédéon, de Barac, de Samson, de Jephté, de David, de Samuel et des prophètes ». Quelques-uns font un crime à saint Paul de placer dans ce passage les noms de Barac, de Samson et de Jephté. Mais quoi ! il a bien pu nommer la prostituée, pourquoi pas ceux-ci ? Il ne s’agit pas ici de juger leur vie, mais seulement de savoir s’il, ont brillé par leur foi.
« Et des prophètes, lesquels par la foi ont conquis des royaumes ». Vous voyez que l’apôtre ne témoigne pas ici de la beauté de leur vie, ce n’était pas son but ; il ne voulait que parler de leur foi. Car, dites-moi, n’est-ce pas par la foi qu’ils ont tout fait ? Et comment ? par la foi, ils ont conquis des royaumes, Gédéon, par exemple. – « Ils ont accompli les devoirs de la justice ». Qui est ici désigné ? Toujours les mêmes ; peut-être par la justice, il entend la charité. – « Ils ont reçu l’effet des promesses ». Je pense que ce trait désigne David. Et de quelles promesses ? De celles qui proclamaient que sa postérité s’assiérait sur son trône. – « Ils ont fermé la gueule des lions, ont arrêté la violence du feu, ont évité la pointe du glaive (33, 34) n. Voyez comme ils étaient déjà pour ainsi dire au sein de la mort ; Daniel au milieu des lions ; les trois enfants dans les abîmes de la fournaise ; Abraham, Isaac, en diverses épreuves, sans jamais même alors se désespérer. C’est, en effet, le caractère de la foi. Quand tout arrive à la malheure, il faut croire en ce moment-là même, que rien de contraire aux divines promesses n’en sortira, mais qu’elles auront leur effet tout entier : « Ils ont évité le tranchant du glaive » ; je pense que ce trait se rapporte encore aux trois enfants. – « Ils se sont remis de leur infirmité, ont été remplis de force et de courage dans les combats, ont mis en fuite les armées des étrangers ». L’apôtre indique, sans donner de date, des faits postérieurs au retour de Babylone. Leur infirmité dont ils se rétablissent, c’est la captivité. Quand les affaires des Juifs étaient désespérées, quand eux-mêmes ressemblaient en tout à des ossements desséchés, eût-on espéré ce retour de Babylone, et non seulement ce retour, mais un complet recouvrement de leurs forces, qui leur fit mettre en fuite les armées des étrangers ? Pour vous, dit saint Paul aux Hébreux, vous n’êtes pas encore dans cet état désespéré. – Tous ces faits sont des figures de l’avenir.
« Les femmes ont recouvré, par la résurrection, leurs enfants morts ». L’apôtre ici, parle des prophètes Élie et Élisée, qui, en effet, ont ressuscité des morts. « Les uns ont été décapités, ne voulant point racheter leur vie présente, afin d’en trouver une meilleure dans la résurrection (35) ». – Mais nous, répondent les Hébreux, nous n’avons pas atteint la résurrection. Eh bien ! je puis vous montrer que ces saints aussi ont passé sous la hache, et qu’ils n’ont point accepté la rédemption de ce supplice, afin de trouver une résurrection meilleure. Pourquoi, en effet, dites-moi, libres de vivre encore, ne l’ont-ils point voulu ? N’est-ce pas parce qu’ils attendaient une vie meilleure ? Eux qui en avaient ressuscité d’autres, ont choisi de mourir, pour gagner une résurrection bien préférable à celle qui rendit des enfants à leurs mères. L’apôtre me paraît désigner ici saint Jean-Baptiste, et saint Jacques. Car l’ apotympanismos, ici nommé, c’est la décapitation. Ainsi, ils avaient le droit de jouir encore du soleil ; ils pouvaient ne pas accuser les pécheurs, et cependant, après avoir ressuscité des morts, ils préférèrent pour eux-mêmes quitter le monde, afin de gagner une résurrection meilleure.
3. « Les autres ont souffert les moqueries et les