Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/602

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

« variées », comprenez à des enseignements de tous genres ; qui, en effet, n’ont rien de stable, mais qui se contredisent, surtout quand il s’agit des aliments purs ou noie. L’apôtre ajoute, en vue de ce dernier point : « Car il est bon d’affermir son cœur par la grâce, et non par tels aliments » : car ici surtout est la variété, ici l’étrangeté de doctrine. Il invective donc contre ces discernements de viandes, et montre que cette vaine observance a précipité les Hébreux dans une véritable hétérodoxie, puisqu’elle les a portés à admettre des enseignements contradictoires et nouveaux. Remarquez toutefois qu’il n’ose pas les accuser expressément, mais seulement par insinuation. Car lorsqu’il dit : « Ne vous laissez pas entraîner à des doctrines variées et étrangères » ; et : « Il est bon, en effet, d’affermir son cœur par la grâce et non par tels ou tels aliments », il ne fait que répéter équivalemment la maxime de Jésus-Christ : « Ce n’est pas ce qui entre dans l’homme qui souille l’homme » (Mt. 15,11) ; démontrant que c’est la foi, au contraire, qui est tout au monde, et que si elle vous affermit, elle vous met le cœur en sûreté. Oui, la foi seule donne à l’âme force et fermeté ; tandis que les raisonnements n’y jettent que le trouble : c’est qu’aussi le raisonnement est l’opposé de la foi.
« Ces vaines observances », continue-t-il, « n’ont point servi à ceux qui les ont pratiquées ». A quoi sert, en effet, une vaine observance, sinon, surtout, à vous perdre, sinon à placer sous le joug du péché celui qui la pratique ? S’il faut des observances, cherchez et suivez celles qui peuvent être utiles à qui les embrasse. Une bonne observance, ce sera la fuite du péché, la droiture du cœur, la piété envers Dieu, la foi vraie et pure. – « Celles-là n’ont point servi à ceux qui les ont suivies », c’est-à-dire, gardées même le plus constamment. L’unique observance doit être de s’abstenir du péché. À quoi sert tout le reste, si quelques-uns même des plus zélés se rendent assez criminels pour ne pouvoir participer aux sacrifices ? Voilà donc des hommes que rien ne sauvait devant Dieu, malgré ce zèle ardent pour leurs pratiques religieuses ; aucune ne leur servait absolument, parce qu’ils n’avaient pas la foi. – L’apôtre continue en déclarant l’abolition du sacrifice d’après son Caractère purement figuratif, et revenant ainsi à son grand principe. « Car », dit-il, « les corps des animaux » dont le sang est porté par le pontife dans « le sanctuaire pour l’expiation du péché, sont bridés hors du camp ; et c’est pour cette raison que Jésus, devant sanctifier le peuple par son propre sang, a souffert hors de la porte de la ville ». Ainsi les sacrifices anciens n’étaient que la figure des nôtres, et Jésus-Christ a tout accompli, en souffrant hors de Jérusalem. L’apôtre fait entendre aussi dans ce passage que Jésus-Christ a souffert de son plein gré ; d’ailleurs ces sacrifices anciens n’étaient pas institués simplement pour eux-mêmes, ils n’étaient que figuratifs, et l’économie de la divine Passion hors des murs de la cité sainte s’y peignait d’avance. Ainsi notre Maître a souffert hors de la ville : mais son sang a été porté jusqu’aux cieux.
4. Vous le voyez : nous communions au sang qui était porté dans le sanctuaire, dans le vrai Saint des saints, au sacrifice dont seul le grand Pontife avait droit de jouir ; nous avons part à la Vérité même. Prenons garde, toutefois, que si, sans participer aux outrages de notre divin Maître, nous avons notre part de salut et de sainteté, ces outrages, cependant, ont été les vraies causes de notre sanctification. Donc, comme il a subi l’opprobre, attendons-nous à le subir ; et si, avec lui, nous « sortons dehors », avec lui un jour nous ne ferons qu’un. Mais qu’est-ce que cet avis : « Sortons dehors, et allons à lui ? » – Partageons ses souffrances, supportons ses opprobres. Ce n’est pas sans mystère qu’il a souffert « hors' de la « porte », mais pour nous apprendre à porter sa croix, nous aussi, à demeurer en dehors du monde, à nous faire un devoir d’en rester ainsi éloignés ; à nous soumettre enfin aux outrages qu’il a subis comme un condamné vulgaire.
« Et par lui, offrons un sacrifice à Dieu ». Quel est ce sacrifice ? L’apôtre même l’interprète « du fruit des lèvres qui rendent gloire à son nom », c’est-à-dire de prières, d’hymnes, d’actions de grâces, car tel est le fruit des lèvres. Les juifs offraient des brebis, des bœufs et des veaux et les donnaient au prêtre. Quant à nous, n’offrons rien de semblable ; mais l’action de grâces, et s’il se peut, en toutes choses, l’imitation de Jésus-Christ. Que tel soit le produit de nos lèvres. « Souvenez-vous d’exercer la charité et de faire part aux autres de vos biens : car c’est par de semblables hosties qu’on se rend Dieu favorable ». Mettons ce sacrifice aux mains de Notre-Seigneur, pour qu’il les offre au Père ; l’offrande ne peut parvenir, en effet, que « par le Fils », ou plutôt par le cœur contrit. Cette recommandation s’accommode à la faiblesse de fidèles encore peu instruits. Car, bien évidemment, au Fils même la grâce appartient autrement comment aurait-il droit à l’égalité d’honneur avec son Père ? Or, dit Jésus-Christ, « il faut que tous honorent le Fils, comme ils honorent le Père ». (Jn. 5,23) Si donc la gloire du Père peut se séparer de la glorification du Fils, ou est l’égalité d’honneur ?
« Le fruit des lèvres qui glorifient son nom », c’est l’action de grâces à lui rendues, en mémoire de tout ce qu’il a souffert pour nous. Supportons avec reconnaissance, pauvreté, maladie, tout au monde enfin ; lui seul connaît ce qui est de notre intérêt véritable. En effet, « nous ne savons ce que nous devons demander à Dieu ». (Rom. 8,26) Que si nous ignorons quel doit être l’objet même de nos demandes, comment, à moins que, l’Esprit de Dieu ne nous le » suggère, connaîtrions-nous nos vrais intérêts ? Efforçons-nous donc d’offrir en toutes choses l’action de grâces, de supporter tous les événements avec générosité de cœur. Quand nous sommes en proie à la pauvreté, à la maladie, rendons grâces à Dieu ! Rendons-lui grâces, quand la calomnie nous assaille, quand l’injustice nous éprouve. Voilà, en effet, autant de moyens qui nous rapprochent de Dieu, qui font même de Lui notre débiteur, tandis que le bonheur et les joies nous rendent ses débiteurs et ses obligés. D’ailleurs,