Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/85

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c’est une fièvre avec sa faim anormale et insatiable, que l’ambition ; c’est une fièvre avec son virus, que l’avarice ; c’est une fièvre avec la privation de la vue, que l’impureté ; l’idolâtrie, c’est une fièvre avec la surdité et le délire qui condamnait l’homme à adorer, à consulter la pierre et le bois ; c’est elle toujours avec l’altération des traits, car les vices nous dégradent ; c’est tout ce qu’il a de plus triste et la plus redoutable maladie. Il vit des hommes plus fous dans leur langage que les êtres en démence, puisqu’ils appelaient Dieu la pierre et le bois. Il nous vit dans cette mer d’iniquités ; et il ne nous prit pas en abomination, en haine, pas même en aversion ; il ne détourna pas sa face ; car il était le Seigneur et ne haïssait point son ouvrage. Que va-t-il donc faire ? Comme un médecin charitable il prépare de précieux médicaments, et il y goûte le premier. Quand il en a constaté la vertu, il nous les présente. Comme premier remède et souverain antidote, il nous donne le bain sacré ; il nous fait vomir toute notre iniquité ; tous les symptômes ennemis prennent la fuite ; l’inflammation cesse, la fièvre est éteinte, le virus est desséché. Tous les symptômes d’avarice, de colère, de tout mal enfin se sont évanouis par la présence de l’Esprit. Nos yeux et nos oreilles s’ouvrirent ; notre langue se délia pour de pieuses paroles ; notre âme acquit la force, notre corps la beauté, cette fleur de beauté que doit avoir un enfant de Dieu engendré par la grâce de son Esprit ; une gloire telle que doit avoir le fils d’un roi, nouvellement né et couché sur la pourpre.

Oh ! quelle noblesse Dieu nous a donnée ! Et nous, envers celui qui nous a tant aimés, nous continuons à être ingrats. Il nous a enfantés, nourris, comblés de biens ; pourquoi fuyons-nous ce généreux bienfaiteur ? Et après tant de merveilles opérées en notre faveur, il nous prête encore sa force : tant que la maladie nous accablait, en effet, nous étions incapables de supporter le fardeau, si lui-même ne nous avait donné le pouvoir. Mais en vain nous a-t-il accordé la rémission de nos péchés, nous avons rendu ce pardon inutile ; en vain tant de richesses, nous les avons dissipées et dévorées ; en vain la force, nous l’avons usée ; en vain la grâce, nous l’avons étouffée ; et comment ? en dépensant tous ces trésors pour des choses qui ne pouvaient nous servir, à de vraies inutilités. Celles-ci nous ont perdus, et, de plus, malheur incomparable, exilés que nous sommes sur une terre étrangère, réduits à la nourriture des pourceaux, nous ne disons pas encore : Revenons à notre Père, faisons-lui cet aveu, nous avons péché contre le ciel et contre vous ; et cela, bien que nous ayons un père si aimant, si désireux de notre retour ! Car abandonnons seulement les voies du vice, et revenons à lui ; et nous verrons qu’il ne peut se résoudre même à nous faire un reproche. Qu’ai-je dit ? Dieu ne peut se résoudre à nous faire un reproche ? non seulement lui-même ne veut pas en faire, mais il ferme la bouche à tout autre qui nous en adresserait ; quand même celui-là serait un de ceux qu’il aime le plus. Ah ! revenons ! jusqu’à quand resterons-nous éloignés ? Comprenons notre déshonneur ; sentons notre dégradation. Le vice nous rabaisse au niveau de l’animal immonde ; le vice affame notre cœur. Retrouvons notre âme ; rentrons en nous-mêmes ; revenons à notre ancienne noblesse et regagnons les biens à venir, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, etc.