Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/93

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Voyons comment Paul a servi Dieu, et voyons aussi comment les gourmands sont les esclaves de leur ventre. Est-ce que pour lui ils n’endurent pas mille morts ? Ne redoutent-ils pas de lui refuser en quoi que ce soit l’obéissance absolue ? Est-ce que l’impossible même, pour lui plaire, ne les trouve pas soumis et obéissants ? Ne sont-ils pas pires que les esclaves ? Paul était loin de cette ignominie ; aussi disait-il : « Pour nous, notre conversation est dans les cieux ». Ne cherchons donc pas le repos ici-bas ; mais efforçons-nous de gagner la gloire de ce royaume dont nous sommes les citoyens. « De là aussi nous attendons le Sauveur, qui est le Seigneur Jésus, qui transformera notre corps, tout vil et abject qu’il est, afin de le rendre conforme à son corps glorieux ». Peu à peu, Paul nous fait monter. Du ciel, dit-il, est notre Sauveur ; le lieu, la personne nous font voir la majesté de Jésus-Christ. « Il transformera notre corps vil et abject » : notre corps, en effet, est maintenant soumis à mille vexations, il souffre les chaînes, les coups, des misères et des maux sans nombre. Mais le corps de Jésus a souffert tout cela ; l’apôtre le fait entendre par ces mots : « Pour qu’il devienne conforme à son corps glorieux » ; c’est donc le même corps, mais revêtu d’immortalité. — « Il transformera notre corps », dit-il ; il aura donc une autre forme, ou bien cette expression, peu exacte, est synonyme de changement. — Il a dit : « Le corps de notre abjection », parce qu’il est maintenant dans l’abjection, soumis à la douleur et à la mort ; parce qu’il paraît vil et sans avantage sur les autres êtres matériels. — « Pour le rendre conforme à son corps glorieux ». Eh quoi ! grand Dieu ? conforme à celui qui maintenant est assis à la droite du Père ? Oui, notre corps devient semblable à celui qu’adorent les anges, qu’environne le cortège des puissances célestes, qui domine au-dessus de toute principauté, vertu, puissance ; voilà celui dont il revêt la ressemblance parfaite.

Toutes les larmes du monde entier suffiraient-elles pour pleurer dignement ceux qui sont déchus d’une si belle espérance, et qui ayant pu devenir conformes au corps glorieux de Jésus-Christ, ont préféré la ressemblance avec les démons. Je ne compte plus pour rien l’enfer ; tous les supplices imaginables ne sont rien en comparaison d’une telle déchéance.

Mais que dites-vous, Paul ? Notre corps deviendrait conforme au sien ? Oui, répond-il ; n’en doutez pas, et il ajoute en preuve que ce sera « par l’opération de sa puissance, par laquelle il peut d’ailleurs s’assujettir toutes choses ». Voici son raisonnement : Il a puissance de tout s’assujettir ; donc aussi le trépas et la mort ; ou plutôt, en vertu de cette même puissance, il fait cette merveille de préférence à toute autre. Où brille, en effet, d’avantage l’œuvre de sa puissance, dites-moi ; est-ce à soumettre anges, archanges, chérubins, séraphins, démons mêmes ? où bien est-ce à rendre un corps immortel et désormais incorruptible ? Dans le premier cas évidemment. Il allègue donc le plus pour vous faire admettre le moins. C’est pourquoi, quand vous verriez tous ces mondains dans la joie, quand vous les verriez dans leur gloire, tenez-vous fermes et debout ; n’en prenez ni ombrage ni scandale. Les espérances que nous vous proposons sont assez hautes pour redresser les plus lâches, pour réveiller les plus endormis.

« C’est pourquoi, mes très chers et très aimés frères, qui êtes ma joie et ma couronne, continuez, mes bien-aimés, et demeurez ainsi fermes dans le Seigneur ». (Phi. 4, 1) — « Ainsi » ; comment ? Comme vous êtes restés déjà, inébranlables. Voyez-vous comment un avis est accompagné d’un éloge ? — « Ma joie et ma couronne », oui, non seulement ma joie, mais ma gloire ; non seulement ma gloire, mais ma couronne. Gloire sans pareille, évidemment, que celle de ces dignes fidèles, puisqu’ils sont la couronne de Paul. — « Demeurez ainsi fermes dans le Seigneur », c’est-à-dire dans l’espérance en Dieu.

3. « Je prie instamment Evodie et je conjure Syntique de s’unir dans les mêmes sentiments en Notre-Seigneur. Je vous prie aussi, très cher conjoint, assistez-les ». Quelques-uns prétendent que dans ces paroles : « Cher conjoint », saint Paul s’adresse à son épouse. C’est absolument faux. Il désigne ainsi, soit une autre femme, soit le mari d’une de celles qu’il a nommées. « Assistez celles qui ont travaillé avec moi dans l’établissement de l’Évangile, avec Clément et les autres, qui m’ont aidé dans mon ministère, et dont les noms sont écrits au livre de vie ». Vous voyez quel magnifique témoignage il rend à leur