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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/234

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pour les mener dans le désert, ni ailleurs ; ce fut au milieu même de leur ville qu’il les frappa. Et maintenant, voyez, jusque dans la plaie, la clémence, car le fléau s’attaqua d’abord aux troupeaux, et ce n’est qu’ensuite qu’il s’étendit sur les hommes. Comment donc ne pas admirer ce pouvoir qui produit toute chose dans le même instant, qui montre à la fois une modération et une sagesse ineffables ? Et en effet, cette plaie ne fut pas la première qu’il leur infligea ; il leur en envoya d’autres d’abord, afin de les corriger, et, quand il frappa le dernier coup, ce rie fut qu’après l’avoir annoncé ; pourquoi ? C’est qu’il voulait par de simples paroles les ramener à la sagesse, et prévenir ainsi une correction effective. Ensuite, quand ils refusèrent de se corriger, Dieu ne permit pas que la plaie eût un, sens équivoque. On aurait pu croire que c’était un effet du hasard, urne maladie, une peste survenue par accident ; mais voyez quel concours de circonstances ! d’abord, dans une seule nuit, tous sont frappés ; secondement, ce sont tous les premiers-nés qui périrent. Une peste ne se serait pas attaquée seulement à tous les premiers-nés, en épargnant les autres ; elle aurait fait, de tous indistinctement, ses victimes ; troisièmement, une peste n’aurait pas absolument respecté les Juifs, de manière à ne s’attaquer qu’aux Égyptiens ; elle aurait, au contraire, sévi bien plus cruellement sur les Juifs, accablés de fatigues, de misères, de tant d’innombrables maux, depuis longtemps épuisés par la pauvreté et par la faim : elle ne serait pas tombée sur les personnes royales, élevées en dignité, jouissant de l’abondance de toutes choses, entourées de tant de soins. Une peste n’aurait pas fait invasion tout à coup ; elle aurait été précédée de symptômes précédant son arrivée. Au contraire ici, le mal sévit tout d’abord, dans toute sa rigueur, afin de confondre la démence des Égyptiens. Après cette plaie, malgré la conscience qui leur disait si clairement que c’était là un fléau envoyé de Dieu, ils poursuivirent les Juifs qui se retiraient. Ce qui est la preuve de leur délire, et la plus forte justification de la conduite de Dieu. Comme les signes allaient cesser, il les termine par un dernier signe qui sert à justifier tous les autres, pour peu qu’on veuille réfléchir sur ces événements. A celui (lui dirait : pourquoi tous les Égyptiens sont-ils punis, quand le roi retient seul les Juifs, est seul coupable ? le dernier signe est une réponse qui résout la question. Comment supprime-t-il l’objection, ce dernier signe ? C’est qu’après que leurs premiers-nés eurent été frappés, les Égyptiens chassèrent les Juifs, même en dépit du roi. Donc, s’ils avaient voulu, dès le commencement, ils auraient été plus forts que le roi ; donc s’ils n’ont pas forcé la main au roi, tout d’abord, ce n’est point qu’ils ne le pouvaient pas, c’est qu’ils ne le voulaient pas. Et de plus, ce qu’ils ont fait ensuite, leur acharnement à poursuivre les Juifs, aggrave encore leur faute.
5. C’est précisément ce que nous avons vu, à propos de Saül. Quand il fallut soustraire son fils à sa colère, tous vinrent, poussés par l’esprit d’adulation, lui arracher ce fils, quoiqu’il eût transgressé la loi. (1Sa. 14,45) Mais quand le roi voulut mettre à mort tant de prêtres, ces mêmes flatteurs ne firent pas entendre une seule parole pour les défendre. (1Sa. 22,17) S’ils avaient pour eux dans le premier cas, un sentiment naturel, dans le second c’était le sentiment du droit qu’ils devaient invoquer. Les victimes étaient des prêtres, et le meurtre était tan sacrilège, un effet de la colère et non d’un juste jugement. Mais la raison de cette conduite c’était l’engourdissement des âmes et l’indifférence à l’égard des prêtres. Eh bien, voyez, plus tard, en punition de ces fautes, quels malheurs ! cette coupable négligence coûta cher. J’en conclus que quand vous serez témoins d’un sacrilège, vous ne devrez pas rester dans l’inertie, dans une lâche indolence ; il faut alors être plus ardent que le feu, ressentir l’injure aussi vivement que les victimes ; c’est par là qu’on évite des calamités sans nombre. – « Depuis l’homme jusqu’aux animaux. » Pourquoi : « Jusqu’aux animaux ? » Comme ils ont été créés pour l’homme, Dieu les punit aussi, à cause de l’homme, afin d’ajouter à l’épouvante ; afin d’aggraver le fléau ; afin de montrer que la plaie est envoyée par Dieu, que la guerre vient du ciel. « Et il a fait éclater des signes et des prodiges, au milieu de toi, ô Égypte (9) ! »
Qu’est-ce à dire : « Au milieu de toi ? » Ou ce terme désigne le lieu, ou il veut dire, d’une manière manifeste. En effet, ces paroles : « Au milieu », signifient partout la même chose que, ouvertement ; c’est ainsi qu’il dit ailleurs : « Il a opéré notre salut au milieu de la terre (Ps. 63,12) ; » ce qui est au milieu, tous le voient. « Il a envoyé des signes et des prodiges