nous ne serions pas jugés » (1Cor. 11,31), ceux qui ont la maladie du péché au point de ne s’en pas repentir, et qui ne se reprochent pas leurs erreurs, ne font qu’attirer sur eux-mêmes, et bâter la vengeance du Seigneur. Puisque ces hommes, tout en pillant les biens d’autrui, ou en prodiguant les leurs qu’ils devraient employer à secourir les pauvres, ne dépensent que pour des tombeaux, pour les vers et la corruption, et que loin de se repentir de ce qu’ils font ils continuent d’être malades, d’une maladie incurable, écoutez quelles sont les conséquences de leur aveuglement. – Ces conséquences, quelles sont-elles donc ? – Ils sont livrés à la vengeance de Dieu ; aussi le Prophète a-t-il ajouté : « Ils seront entassés comme des brebis, la mort sera leur pasteur (15). » S’il les compare à des brebis, ce n’est point à cause de leur douceur (quoi de plus féroce que ces hommes qui voient d’un œil sec la nudité des pauvres, et leur ventre creusé par la faim, et qui embellissent leurs tombeaux, séjour de la corruption, des vers et de la pourriture !), c’est parce que leur ruine sera facile, parce qu’ils seront anéantis tout à coup, et qu’ils offrent une proie facile aux embûches de leurs ennemis. Rien de plus faible en effet que l’homme qui vit dans le péché. Telle sera aussi leur condition : ils seront frappés, ils seront anéantis aussi complètement, ils seront précipités en enfer avec autant d’aisance, de facilité, de promptitude, avec aussi peu de peine que des brebis qu’on immole. Ce sera la mort, où plutôt quelque chose de bien plus redoutable que la mort qui les frappera. Car après cette fin, une mort immortelle s’emparera d’eux, ils ne reposeront jamais dans le sein d’Abraham, et on ne lés verra jamais aller ailleurs que dans l’enfer, ce séjour des vengeances, des châtiments et de l’extermination. Ici-bas leur fin aura été vile, méprisable, et là-haut ils ne connaîtront que les châtiments. On a coutume de dire : on l’a égorgé comme un mouton, quand on veut parler d’un homme facile à tuer. Après avoir vécu comme des brutes, ils périssent comme des brutes sans l’espoir consolant de la vie future, et ce ne sera pas tout, « la mort sera leur pasteur ! »
Il me semble que dans ce passage le Prophète, en parlant de la mort, veut parler des châtiments et de l’extermination qui attendent le coupable là-bas ; c’est ainsi qu’il dit ailleurs : « L’âme qui pèche, périra elle-même (Ez. 18,20) », pour nous faire comprendre, non
qu’elle sera détruite en réalité, mais qu’elle sera punie. C’est une suite de là même figuré, car après avoir parlé des brebis, il nous montre leur pasteur. Quel est-il ce pasteur ? C’est le ver venimeux, ce sont les ténèbres sans fin, les chaises qui ne se délient jamais, les grincements de dents. Voyez que de châtiments les pressent de toutes parts ! Dans cette vie, ils ne peuvent arriver à la vertu, ils sont les esclaves, les captifs du péché, ils se livrent à des travaux vains et ridicules : à la fin de cette vie, ils meurent comme la première brute venue après la fin de cette vie, ils sont voués pour toujours à l’extermination : « Et, quand le jour se lèvera ; ils seront dominés par les justes. » Comme beaucoup ; parmi ceux qui ont l’esprit le plus épais et dont l’insensibilité égale presque celle des pierres, n’ont aucune idée nette et précise de la vie future.qu’ils doivent espérer, et qu’ils restent bouche béante à admirer les biens présents, les biens qu’ils voient, il cherche à les épouvanter par le sens caché de ses reproches. Ensuite, après avoir en quelques mots, fait allusion à ce que l’avenir leur réserve, il insiste de nouveau sur le mépris et sur les châtiments qui les atteignent dès cette vie, et il fait cela pour leur montrer combien ils sont faibles, vils et méprisables, et que, fussent-ils dix mille fois plus riches, hissent-ils au comble de la puissance, ils n’en sont pas moins de véritables esclaves à côté de ceux qui suivent les traces de la vertu. Aussi dit-il : « Et, quand le jour se lèvera, ils seront dominés par les justes », c’est-à-dire, les justes les domineront immédiatement, et toujours, et pour cela ils n’auront besoin ni dé faire un effort, ni d’attendre longtemps, ni même d’attendre un instant. Car telle est la nature des choses, le vice est l’esclave de la vertu, il la craint, il là redoute, malgré son fard et tous ses brillants déguisements, et quoique la vertu toute nue ne combatte qu’avec ses seules forces. Et cependant nous voyons le contraire, dit-on, nous voyons les méchants dominer les bons. Mais ne nous en rapportons pas à l’erreur du Vulgaire, erreur née d’un faux jugement.. Examinons les choses suivant la droite raison et vous verrez se réaliser ce que j’ai avancé. Supposons un maître pervers avec un esclave vertueux : ou plutôt, si vous l’aimez mieux, choisissons un exemple plus relevé. Supposons
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