HOMÉLIE XV.
NUL N’A JAMAIS VU DIEU : LE FILS UNIQUE, QUI EST DANS LE SEIN DU PÈRE, EST, CELUI QUI EN A DONNÉ LA CONNAISSANCE. (VERSET 18)
ANALYSE.
- 1. Personne n’a jamais vu Dieu dans sa substance.
- 2 et 3. Jésus-Christ connaît parfaitement le Père parce qu’il est dans son sein. – Dispute contre les Ariens et tous les autres hé rétiques qui ont combattu la Divinité, de Jésus-Christ. – Ce que Jésus-Christ nous a fait connaître de plus que les prophètes et Moïse. – Les chrétiens ne sont tous qu’un seul corps, ce qui est le plus grand, lien de l’amitié.
1. Ce n’est pas la volonté de Dieu que nous écoutions seulement les mots et les paroles de la sainte Écriture : nous devons encore en méditer profondément le sens. C’est pour cette raison que le bienheureux. David a mis à plusieurs de ses psaumes cette inscription : « Pour l’intelligence », et qu’il disait : « Ôtez le voile qui est sur mes yeux, et je considérerai les merveilles qui sont enfermées dans votre loi ». (Ps. 118,18) Après lui, son fils Salomon nous apprend qu’il faut désirer la sagesse avec le même empressement qu’on recherche l’argent, ou plutôt qu’il faut l’estimer plus que l’or. Le Seigneur exhorte les Juifs à examiner avec soin les Écritures (Jn. 5,39), et nous invite à en faire notre plus grande étude il n’aurait pas parlé de la sorte si, pour les entendre, il n’y avait qu’à les lire. Personne, en effet, ne s’avisera d’examiner attentivement ce qui se fait connaître au moment qu’il se présente aux yeux, mais seulement ce qui est obscur, et ce qui a besoin d’un long examen il appelle les Écritures un trésor caché, pour nous exciter à le chercher.
Je dis ceci, mes frères, afin que nous n’abordions pas légèrement et négligemment les saintes Écritures : je le dis, afin que vous les écoutiez avec beaucoup d’attention. Si on les écoute sans préparation, sans attention, et si l’on n’en prend que la lettre, on se formera de Dieu bien d’absurdes idées : on le croira homme, on croira qu’il est d’airain, colère, furieux, et l’on adoptera bien d’autres dogmes encore pires. Mais si l’on en pénètre l’esprit, si l’on entre dans leur profondeur, on sera bien éloigné de ces ridicules opinions.
Par exemple, dans les paroles qu’on a lues, et que nous nous proposons d’expliquer, il est dit que Dieu a un hein, ce qui n’appartient qu’aux corps. Mais il n’y a personne d’assez insensé pour penser que l’Être incorporel soit un corps. Afin donc que nous prenions tout dans un sens spirituel, examinons cet endroit en remontant plus haut. « Nul », dit l’évangéliste, « n’a jamais vu Dieu » : par quel enchaînement d’idées est-il conduit à cette proposition ? Après avoir montré la magnificence des dons que nous devons à Jésus-Christ et comment ils surpassent infiniment tout ce qu’a fait Moïse, il veut enfin nous découvrir la vraie cause de la différence qui est entré eux et entre leurs dons. Moïse, en effet, étant un serviteur, a été un ministre chargé de la dispensation des moindres présents ; mais celui-ci qui est seigneur, qui est roi, fils du roi, qui est toujours avec son Père, et le voit sans cesse, nous a apporté des dons infiniment supérieurs à ceux de Moïse. Voilà pourquoi saint Jean poursuit en ces termes : « Nul n’a jamais vu Dieu ».
Que répondrons-nous donc à Isaïe qui fait si hautement retentir sa voix, en disant : « J’ai vu le Seigneur assis sur un trône sublime et élevé ? » (Is. 6,1) A Jean qui lui rend