son fils sans aller chez lui. Ainsi quand il dit : « Si vous ne voyez des miracles et des prodiges, vous ne croyez point », c’est comme s’il disait : Vous n’avez point encore une foi digne de moi, et vous me regardez encore comme un prophète. Jésus-Christ donc, pour manifester ce qu’il est et montrer qu’il faut croire en lui, même indépendamment des miracles, s’est servi des mêmes paroles par lesquelles il s’est fait connaître à Philippe : « Ne croyez-vous pas que je suis dans mon a Père et que mon Père est en moi ? (Jn. 14,10) Quand vous ne me voudriez pas croire, croyez à mes œuvres ». (Jn. 10,38)
« Et comme il était en chemin, ses serviteurs vinrent au-devant de lui, et lui dirent : a Votre fils se porte bien (51).
« Et s’étant enquis de l’heure qu’il s’était a trouvé mieux, ils lui répondirent : Hier, environ la septième heure » du jour « la fièvre le quitta (52).
« Son père reconnut que c’était à cette heure-là que Jésus lui avait dit : Votre fils se porte bien ; et il crut, lui et toute sa famille (53) ».
Ne le remarquez-vous pas, mes très-chers frères, que le bruit de ce miracle se répandit aussitôt ? En effet, cet enfant ne fut pas délivré d’une manière ordinaire du péril où il était, mais sa guérison eut lieu sur-le-champ ; d’où il est visible qu’elle n’était point naturelle, et que c’est Jésus-Christ qui l’avait opérée par sa vertu et par sa puissance. Déjà il était arrivé aux portes de la mort, comme le déclarent ces paroles du père : « Venez avant que mon fils meure », lorsque tout à coup il en fut arraché ; voilà aussi ce qui étonna les serviteurs. Peut-être même accoururent-ils non seulement pour apporter cette bonne nouvelle, mais encore parce qu’ils regardaient comme inutile que Jésus-Christ vînt : ils savaient effectivement que leur maître devait être arrivé ; voilà pourquoi ils furent à sa rencontre par le même chemin. Au reste, cet officier cessant de craindre, ouvre son cœur à la foi, pour montrer que c’est son voyage qui lui a procuré le miracle de la guérison de son fils ; il déploie toute sa diligence de peur qu’on ne croie qu’il l’ait fait inutilement ; et c’est aussi pour cela qu’il s’informe exactement de tout : « Et il crut, lui et toute sa famille ». Ce témoignage était exempt de tout doute et de tout soupçon. En effet, ses serviteurs, qui n’avaient point été présents au miracle, qui n’avaient point entendu Jésus-Christ, ni su l’heure, ayant appris de leur maître que c’était à cette même heure que lui avait été accordée la guérison de son fils, eurent une preuve très-certaine et très-évidente de la puissance de Jésus-Christ, et voilà pourquoi ils crurent aussi eux-mêmes.
Quel enseignement, mes frères, tirerons-nous de là ? Que nous, ne devons point attendre des miracles, ni demander au Seigneur des gages de sa divine puissance. Je vois des gens qui font paraître un plus grand amour de Dieu lorsque leurs fils ou leurs femmes ont reçu quelque soulagement dans leur maladie ; mais quand bien même nos vœux et nos désirs ne sont point exaucés, il est juste de persévérer toujours dans la prière, de ne pas cesser de chanter des cantiques d’actions de grâces et de louanges. C’est là le devoir des serviteurs fidèles ; c’est là ce que doivent au Seigneur ceux qui l’aiment et le chérissent comme il faut ; ils doivent, dans la prospérité et dans l’adversité, dans la paix et dans la guerre, toujours également accourir et s’attacher à lui ! Rien, en effet, n’arrive que par l’ordre de sa divine providence : « Car le Seigneur châtie celui qu’il aime, et il frappe de verges tous ceux qu’il reçoit au nombre de ses enfants ». (Héb. 12,6) Celui qui ne le sert et qui ne l’honore que lorsqu’il vit dans la paix et dans la tranquillité, ne donne pas des marques d’un fort grand amour, et ne montre pas qu’il aime purement et sincèrement Jésus-Christ ; mais pourquoi parler de la santé, des richesses, de la pauvreté, de la maladie ? Quand même vous seriez menacés du feu, des plus cruels et des plus horribles tourments, vous ne devriez pas pour cela cesser un instant de chanter les louanges du Seigneur ; mais il vous faudrait tout souffrir pour son amour : tel doit être le fidèle serviteur, telle est une âme ferme et constante. Avec ces dispositions, vous supporterez facilement, mes chers frères, les afflictions et les calamités de la vie présente, vous acquerrez les biens futurs, et vous vous présenterez avec beaucoup de confiance devant le trône de Dieu. Veuille le ciel nous la départir à tous, cette confiance, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartient la gloire dans tous les siècles des siècles ! Ainsi soit-il.
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