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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 8, 1865.djvu/37

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faire voir qu’il allait volontairement à la mort. Il le fit aussi pour nous apprendre à recevoir avec action de grâces tous les maux que nous souffrons, et pour fortifier et affermir notre espérance. Car si la figure a eu tant de force que de délivrer tout un peuple d’une dure captivité, combien plus la vérité aura-t-elle le pouvoir de tirer tout l’univers de la servitude, et de combler de biens tous les hommes ? C’est pourquoi il n’avait point voulu leur faire part de ces mystères avant le moment où la Loi devait cesser. Il abolit la première et la principale de leurs fêtes, et les fait passer à une autre Pâque pleine d’une sainte frayeur. « Prenez », leur dit-il, « et mangez. Ceci est mon corps qui est livré pour vous ».
Comment n’ont-ils point été troublés en entendant ces paroles ? Parce que déjà auparavant il leur avait dit plusieurs grandes choses de ce mystère. Voilà pourquoi il leur dit ici cette parole sans aucun préambule, les jugeant assez préparés à l’entendre. Il leur découvre la cause de sa passion, c’est-à-dire « la rémission des péchés ». Il appelle ce sang, « le sang de la nouvelle alliance », c’est-à-dire de la promesse de la Loi nouvelle. Car c’est ce qu’il a promis de nouveau, et c’est par ce sang que la nouvelle alliance est confirmée. Et comme l’ancienne avait pour son partage le sang des bêtes qu’elle immolait, de même la nouvelle a pour le sien le sang du Seigneur.
Il témoigne encore par ces paroles qu’il s’en va mourir, et c’est pour cela qu’il parle de « Testament », et qu’il nous remet en mémoire cet Ancien Testament qui avait été aussi scellé et consacré avec le sang. Puis il déclare la cause de sa mort en disant : « Que ce sang sera répandu pour plusieurs, afin d’effacer leurs péchés ».
Il dit ensuite : « Faites ceci en mémoire de « moi ». On voit par ces paroles comment il veut nous retirer de l’observation des coutumes judaïques. Car, comme vous faisiez autrefois la Pâque en mémoire des miracles que vos pères avaient vu faire en leur faveur dans l’Égypte, de même vous ferez ceci en mémoire de ce que je fais maintenant pour vous. Le sang dont les portes des Israélites furent alors teintes, n’était que pour sauver les premiers nés ; mais celui-ci est répandu pour la rémission des péchés du monde entier. « Car ceci », dit-il, « est mon sang qui sera répandu pour la rémission des péchés ».
Or, il voulait faire connaître à ses disciples que sa passion et sa croix était un mystère, et apporter ainsi quelque consolation à leur douleur ; et comme Moïse avait dit : « Ceci vous servira d’une mémoire éternelle » ; de même Jésus-Christ dit à ses disciples : « Faites ceci en mémoire de moi, jusqu’à ce que je vienne ». Et c’est pour cette raison qu’il ajoute : « J’ai désiré d’un grand désir de manger cette Pâque avec vous », c’est-à-dire, de vous donner des choses nouvelles et de vous faire part d’une Pâque qui vous rendra spirituels. Il en but aussi lui-même de peur que les disciples, ayant ouï ces paroles, ne disent : Quoi ! buvons-nous du sang et mangeons-nous de la chair ? et qu’ainsi ils ne se troublassent comme plusieurs Juifs avaient déjà fait, lorsqu’il avait seulement parlé de ce mystère. Il leur montre donc l’exemple, afin de les faire approcher avec un esprit tranquille de la communion de ses mystères.
Mais faut-il donc, direz-vous, célébrer aussi l’ancienne Pâque ? Point du tout, puisque Jésus-Christ ne nous a dit : « Faites ceci », que pour nous retirer de la Pâque ancienne. Et s’il opère en celle-ci la rémission des péchés, comme il le fait en vérité, n’est-il pas superflu de célébrer cette ancienne cérémonie légale ? Comme il avait donc voulu que la première Pâque servît aux Juifs d’un monument éternel des grâces qu’il leur avait faites ; il veut ici de même que cette nouvelle Pâque serve aux chrétiens pour leur rappeler éternellement dans la mémoire le souvenir des dons infinis de leur Sauveur. Il veut par cette conduite fermer la bouche aux hérétiques, parce que, lorsqu’ils demandent où est la preuve certaine qu’il a été immolé, nous les réduisons au silence en leur alléguant entre plusieurs autres raisons les saints mystères. Car si Jésus-Christ n’est pas mort, de qui ce sacrifice que nous célébrons est-il le symbole ?
2. Voyez-vous, mes frères, combien Jésus-Christ a désiré que nous eussions toujours présente la mémoire de la mort qu’il a soufferte pour nous ? Comme il devait s’élever des hérétiques impies, Marcion, Manès, Valentinien, et leurs disciples, qui nieraient le mystère de la mort du Sauveur, c’est pourquoi il fait mention de sa passion, même au milieu de l’institution de cet autre mystère de son