Juifs avaient encore introduit celle-ci : le sacerdoce n’était plus à vie, il était seulement annuel. Par là les dignités étaient devenues vénales ; et néanmoins, dans cette corruption même où ils étaient tombés, le Saint-Esprit les assistait encore. Mais lorsqu’ils eurent mis la main sur Jésus-Christ, alors ce divin Esprit les abandonna, et se transporta sur les apôtres. Le voile du temple, qui se déchira en deux (Mt. 27,51), fut une marque de cet abandon. Jésus-Christ a aussi fait entendre sa voix, en disant : « Le temps s’approche que votre maison demeurera déserte ». (Id. 23,38) Et Josèphe, qui est venu quelque temps après, rapporte, dans son histoire, que les anges qui demeuraient avec eux leur avaient déclaré que s’ils ne changeaient de vie et ne devenaient meilleurs, ils se retireraient. Tant que la vigne a subsisté, toutes choses se sont passées parmi eux selon qu’elles avaient coutume de se passer ; mais quand ils eurent tué l’héritier, il n’en a plus été de même, ils ont tous péri ; et Dieu ôtant en quelque sorte à ce fils ingrat, c’est-à-dire, aux Juifs, la robe brillante dont il l’avait revêtu, il l’a donnée à de bons serviteurs, aux gentils qui se sont convertis à la foi, et les Juifs, il les a laissés seuls et dans la nudité.
Au reste, ce n’était pas une chose peu merveilleuse et peu étonnante que ce fût un ennemi qui prophétisât un événement si considérable et si prodigieux. Une pareille prédiction était capable d’attirer et de gagner le peuple ; en effet, il arriva tout le contraire de ce que désirait lé pontife. Car, par cela même que Jésus-Christ est mort, les fidèles, ceux qui ont cru en lui, ont été délivrés du supplice auquel ils étaient condamnés. Que veulent dire ces paroles : « Pour rassembler et réunir ceux qui sont proches, et ceux qui sont éloignés (52) ? » Il les a tous réunis en un seul corps : celui qui est à Rome regarde les Indiens comme ses membres. Quoi de comparable à une pareille réunion ? et le chef de tous est Jésus-Christ. « Ils ne songèrent plus, depuis ce jour-là, qu’à trouver le moyen de le faire mourir (53) ». Auparavant ils cherchaient, car l’évangéliste dit : « Les Juifs donc cherchaient à le faire mourir ». (Jn. 7,11) Et Jésus-Christ leur dit : « Pourquoi cherchez-vous à me faire mourir ? » (Id. 20) Mais alors ils cherchaient seulement (Id. 5,18) ; et maintenant leur résolution est prise, et ils ont mis la main, à l’œuvre. « C’est pourquoi Jésus ne se montrait plus en public parmi les Juifs (54) ». Ici encore Jésus pourvoit à sa sûreté d’une manière humaine, et souvent il fait de même.
2. J’ai déjà dit le sujet pour lequel Jésus-Christ s’est souvent enfui et s’est éloigné de ses ennemis. Maintenant il se retire à Ephrem, près du désert, et s’y tient avec ses disciples. Mais quel pensez-vous, mon cher auditeur, que fut le trouble dés disciples, voyant leur Maître s’enfuir de la sorte, et pourvoir à sa sûreté d’une manière humaine ? Personne alors
ne l’accompagna ; comme la Pâque était proche, tous les Juifs accouraient en foule à Jérusalem. Ainsi, lorsque tous étaient dans la joie, en fêtes et en réjouissances ; alors les disciples se cachaient et se voyaient en péril ; mais néanmoins ils demeuraient fermement attachés à leur Maître ; pendant que les Juifs célébraient la Pâque et la scénopégie, ils restaient cachés dans la Galilée. Mais aussi c’est alors qu’était seuls avec leur Maître, et obligés de fuir et de se cacher, ils avaient l’avantage de lui marquer tout leur attachement et leur amour. C’est pourquoi saint Luc rapporte que Jésus leur dit : « j’ai demeuré avec vous dans les tentations[1] » (Lc. 22,28) ; voulant leur faire connaître que c’était sa grâce qui les fortifiait et les rendait si fermes.
« Car plusieurs de ce quartier-là allèrent à Jérusalem pour se purifier. Et les princes des prêtres et les pharisiens avaient donné ordre de le prendre (55, 56) ». Belle manière de se purifier avec une volonté délibérée de faire mourir Jésus, et de tremper les mains dans son sang ! « Et ils disaient « Que vous en semble-t-il ? viendra-t-il à la fête ? » (Id) Au grand jour de Pâques, ils tendaient des pièges à Jésus : d’un temps de fête et de joie, ils faisaient un temps de meurtre et de carnage ; c’est comme s’ils avaient dit : La fête l’appelle ici, il faut qu’il vienne tomber dans nos pièges. O quelle impiété ! Lorsqu’il fallait donner des marques d’une plus grande piété, et délivrer les plus grands criminels, alors même ils tâchent de prendre l’innocent. Mais de plus, ayant tenté
- ↑ On lit autrement ce passage, et dans le texte grec et dans le latin. Saint Chrysostome l’a apparemment lu de même dans son manuscrit, ou bien il l’a voulu accommoder à son sujet. Nos deux textes, le grec, et le latin disent : « C’est vous qui rites toujours demeurés fermes avec moi dans mes tentations ».