car la vertu du Saint-Esprit était grande et puissante en eux ; c’était elle qui leur enseignait toutes choses.
« Celui qui a mes commandements et qui les garde, c’est celui-là qui m’aime (21) ». Il ne suffit pas seulement de les avoir, mais il faut encore les garder exactement. Mais pourquoi Jésus-Christ répète-t-il cela si fréquemment à ses disciples, comme quand il leur dit : « Si vous m’aimez, gardez mes commandements (15) » ; et : « Celui qui a mes commandements et qui les garde » ; et : « si quelqu’un écoute ma parole et la garde, c’est celui-là qui m’aime. Celui qui ne m’écoute pas ne m’aime point ? » Je crois qu’il fait allusion à leur tristesse. Comme il leur avait fait de longs discours sur la mort, disant : « Celui qui hait sa vie en ce monde, la conserve pour la vie éternelle » (Jn. 12,25) ; et : « Celui qui ne prend pas sa croix et ne me suit pas, n’est pas digne de moi » (Mt. 10,38) ; et qu’il devait beaucoup encore leur en parler, il leur fait cette réprimande : Vous croyez que c’est votre amour pour moi qui vous rend tristes ; ne vous point attrister, ce serait m’en donner un plus grand témoignage et une plus grande preuve. Voulant donc produire cet effet dans leur cœur, il résume par là ce qu’il leur a dit. « Car si vous m’aimiez », leur dit-il, « vous vous réjouiriez de ce que je m’en vais à mon Père (28) ». Maintenant donc, ce n’est point l’amour, c’est la crainte qui vous rend tristes. Vous abattre et vous attrister de la sorte, est-ce me marquer que vous vous souvenez de mes commandements ? Si vous m’aimiez véritablement, vous courriez de vous-mêmes à la croix et à la mort, puisque ma doctrine vous exhorte à ne rien craindre de la part de ceux qui tuent le corps. (Mt. 10,28) Voilà ceux que mon Père aime et que j’aime aussi. « Et je me découvrirai moi-même à eux (22) ». Alors « Jude lui dit : D’où a vient que vous vous découvrirez vous-même à nous ? »
3. Ne le voyez-vous pas, mes chers frères, que l’âme des disciples était accablée de crainte et de frayeur ? Jude est tout ému et tout troublé ; il s’imagine qu’il verra son Maître comme nous voyons les morts, en songe. Jésus-Christ donc, pour effacer de son esprit ces sortes d’idées, lui répond : « Mon Père et moi nous viendrons à lui, et nous ferons en lui notre demeure (23) ». C’est comme s’il disait : Ainsi que mon Père se découvre lui-même, ainsi, je me découvrirai moi-même. Et le Sauveur ne se contente pas de tirer Jude de ses fausses idées par cette parole : « Mon Père et moi nous viendrons » ; mais en ajoutant encore : « Et nous ferons en lui notre demeure », il les chasse absolument. En effet, ce séjour exclut l’idée d’un songe.
Pour vous, mon cher auditeur, considérez, je vous prie, ce disciple qui, dans son agitation et son trouble, n’ose pas ouvertement déclarer ce qu’il pense et ce qu’il aurait bien voulu demander. Il n’a point dit : Malheur à nous ! vous allez mourir, et vous vous ferez voir à nous, comme les morts apparaissent. Non, il ne s’est pas expliqué de cette manière, mais il a dit : « D’où vient que vous vous découvrirez vous-même à nous, et non pas au monde ? » Jésus-Christ leur dit donc : « Je vous aime, parce que vous gardez mes commandements ». Il les prévient et leur prédit ces choses, afin qu’ils ne croient pas voir un fantôme, lorsqu’ils le verront dans la suite ; et de peur qu’ils ne s’imaginent qu’il leur apparaîtra de la manière que j’ai dite, il leur explique la raison pour laquelle il demeurera avec eux. C’est, dit-il, parce que vous gardez mes commandements ; il leur prédit encore que le Saint-Esprit se fera voir à eux, et demeurera avec eux de la même manière que lui. Que si les apôtres, après avoir si longtemps demeuré et conversé avec Jésus-Christ, ne peuvent pas le voir sans effroi dans sa substance spirituelle, ni même comprendre ce que c’est, ils en auraient été bien plus en peine, et dans une plus grande terreur, si au commencement il leur était apparu de même et dans cette forme spirituelle ? Voilà pourquoi il mange avec eux, de peur qu’ils ne le prennent pour un fantôme. Si, le voyant marcher sur les eaux, ils crurent que c’était un fantôme (Mc. 6,49), encore qu’il eût le même visage et la même figure, et qu’il ne fût pas bien loin d’eux ; dans quels soupçons et quelles imaginations ne seraient-ils pas tombés, s’ils l’avaient vu ressusciter aussitôt après qu’ils l’avaient vu prendre et ensevelir ? Si donc il leur dit souvent qu’il leur apparaîtra, et comment, et pour quelle raison ; c’est afin qu’ils ne regardent pas sa résurrection comme une illusion, et qu’ils ne le prennent pas pour un fantôme.
« Celui qui ne m’aime point, ne garde point