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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 8, 1865.djvu/492

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soyez point scandalisés ». À savoir, lorsque vous trouverez bien des incrédules, et que vous aurez à essuyer de grands travaux et de grandes afflictions. « Ils vous chasseront de la synagogue (2) ». Car les Juifs avaient déjà arrêté entre eux que, si quelqu’un reconnaissait Jésus pour le Christ, il serait chassé de la synagogue[1]. (Jn. 9,22) « Et le temps vient que quiconque vous fera mourir, croira faire une chose agréable à Dieu ». Ils machinent votre mort, comme s’ils faisaient une œuvre pieuse et agréable à Dieu. Ensuite, le divin Sauveur console encore ses disciples par ces paroles : « Ils vous traiteront de la sorte, parce qu’ils ne connaissent ni » mon « Père, ni moi (3) ». C’est un assez grand sujet de consolation pour vous que de souffrir ces choses pour mon Père et pour moi. Ici Jésus-Christ rappelle encore à leur mémoire cette béatitude, dont il leur avait parlé au commencement : « Vous êtes heureux, lorsque les hommes vous chargeront de malédictions, et qu’ils vous persécuteront, et qu’ils diront faussement toute sorte de mal contre vous à cause de moi. Réjouissez-vous alors, et tressaillez de joie, parce qu’une grande récompense vous est réservée dans les cieux ». (Mt. 7,12)
« Je vous ai dit ces choses, afin que, lorsque ce temps-là sera venu, vous vous en souveniez (4) », et que vous regardiez tout le reste, d’après cela, comme digne de foi. Car vous ne pourrez point dire que je vous aie annoncé ces choses par flatterie, ou par adulation, ni aussi que mes paroles soient fausses et trompeuses. En effet, celui qui aurait le dessein de vous tromper ne vous annoncerait pas ce qui est capable de vous détourner de lui. C’est pourquoi je vous ai prédit ces choses afin que, lorsqu’elles arriveront, vous n’en soyez point surpris, ni troublés, et encore pour une autre raison, à savoir, afin que vous ne disiez point que je n’ai pas prévu qu’elles devaient arriver. Souvenez-vous donc que je vous les ai dites. Car les Juifs alléguaient toujours de mauvaises raisons et de méchants prétextes, pour les persécuter et les chasser comme des impies et des scélérats ; mais les disciples ne s’en troublaient point, parce qu’ils avaient appris qu’il n’arrivait rien qui n’eût été prédit, et qu’ils savaient pourquoi ils étaient maltraités : ce qui était très-capable d’élever leur esprit et de les rendre fermes et courageux. Voilà pourquoi Jésus-Christ répète souvent ces paroles : ils ne m’ont point connu, et ils vous traiteront de la sorte à cause de moi, à cause de mon nom, à cause de mon Père, et j’ai été persécuté et maltraité le premier ; et encore : ils me haïssent, ils me maltraitent sans aucun sujet.
4. Faisons aussi nous-mêmes, mes frères, de sérieuses réflexions sur ces vérités dans les afflictions qui nous arrivent, lorsque les méchants nous persécutent et nous maltraitent. Jetons les yeux sur notre chef, sur l’auteur et le consommateur de notre foi (Héb. 12,2) ; considérons que ce sont les méchants qui nous font souffrir ; considérons que c’est pour la vertu, que c’est pour Jésus-Christ que nous souffrons : pesons ces choses, et tout nous paraîtra aisé et supportable. Que si lorsqu’on souffre pour ceux que l’on aime, on s’en glorifie ; lorsque c’est pour Dieu que l’on souffre, doit-on sentir encore ses maux et ses souffrances ? Si une chose ignominieuse, telle que la croix, Jésus-Christ l’appelait pour l’amour de nous, une gloire : à combien plus forte raison devons-nous être nous-mêmes dans ces sentiments et ces dispositions ! Et si nous pouvons ainsi mépriser les tourments, nous pouvons, à plus forte raison, mépriser les richesses et l’avarice. Donc, quand il nous arrive de grandes afflictions, il ne faut pas seulement regarder les peines et les travaux, mais il faut encore envisager les couronnes et les récompenses.
Comme les marchands ne pensent pas seulement aux mers qu’ils ont à traverser, mais encore au gain et au profit qui leur en doit revenir, nous devons de même penser au ciel et à l’accès qui nous sera donné auprès de Dieu. Que s’il vous paraît doux de s’enrichir par des rapines, souvenez-vous que Jésus-Christ vous le défend, et incontinent cela vous deviendra désagréable et amer. Et encore, si vous avez de la peine à faire part de vos biens aux pauvres, ne pensez pas seulement à ce qu’il vous en coûte, mais oubliez la semence et tournez toutes vos pensées vers la moisson. S’il vous paraît difficile de vous abstenir d’aimer la femme d’autrui, envisagez la couronne que vous procurera ce combat, et vous remporterez facilement la victoire. Car si la crainte des hommes vous peut retenir, et vous détourner des mauvaises actions, à combien

  1. Chassé de la synagogue : C’est ce que nous appelons excommunié.