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SECONDE ACTION CONTRE VERRÈS.

DISCOURS SEPTIÈME.


ARGUMENT.

Dans le second livre l’orateur arrive au fond même de la cause, aux crimes que Verrès a commis en Sicile. Il accuse le préteur d’avoir, contre toutes les lois, exigé de grandes sommes d’argent pour rendre la justice. Ce discours est intitulé de jurisdictione Siciliensi, parce que le principal objet, sinon le seul que l’orateur y traite, est la manière même dont Verrès a rendu la justice en Sicile.

Cicéron commence par un magnifique éloge de la Sicile dont il vante la fidélité, l’attachement au peuple romain, la fécondité et la richesse, si utiles à Rome. Scipion l’Africain, Marcellus ont toujours respecté cette province qui aida Rome à détruire Carthage : un Verrès ose l’opprimer. Il a exercé d’odieuses rapines même envers les citoyens romains établis dans l’île pour y faire le commerce.

La Sicile tout entière, à l’exception des Mamertins, envoie aujourd’hui des accusateurs contre Verrès. Après s’être appuyé sur des témoignages aussi imposants que nombreux, l’orateur raconte la manière injuste, arbitraire et cruelle, dont il a jugé Dion d’Halèse, Sosippe, Épicrate d’Argyrone, Héraclius de Syracuse, Épicrate de Bidis. Dans la condamnation de Sopater et de Sthénius, il a poussé le mépris de toutes les lois jusqu’à mériter lui-même la peine capitale. Ces narrations remplissent et animent la première partie du discours.

Suivent d’autres accusations contre Verrès. L’argent qu’il tirait de l’élection des sénateurs, des pontifes et des censeurs ; la contribution pour les statues ; ses vols, ses gains usuraires, de complicité avec les fermiers publics, et surtout avec Carpinatius, dont les registres décèlent ses malversations : telle est la matière de la seconde partie de ce discours, où l’on remarque surtout le portrait de Timarchide, un des principaux agents de Verrès.

La péroraison, qui accable Verrès sous le poids de ses crimes, se termine par une insinuation contre le désintéressement d’Hortensius, qui n’a pas dû prêter gratuitement son éloquence à un tel homme.


LIVRE SECOND.

SUR SA PRÉTURE EN SICILE.

I. Juges, il me faudra passer bien des faits sous silence, si je veux enfin remplir la tâche qui m’a été confiée. Car je me suis chargé de la cause de la Sicile, qui m’a engagé à prendre sa défense. Toutefois en m’imposant ce fardeau, en acceptant cette cause, j’ai embrassé un plus grand objet c’est la cause d’un ordre tout entier, celle du peuple romain que j’ai entrepris de défendre, persuadé qu’on pourrait enfin obtenir des juges un arrêt équitable le jour où on leur dénoncerait un vrai coupable, et où la voix d’un accusateur ferme et zélé se ferait entendre devant eux. Je me hâterai donc d’en venir à la cause de la Sicile, sans parler de tous les vols et de toutes les infamies commis ailleurs par cet homme ; de cette manière j’y appliquerai toutes mes forces, et j’aurai plus de temps pour la mieux exposer.

Mais, avant de vous faire connaître les malheurs de la Sicile, je crois devoir dire quelques mots sur l’illustration, l’antiquité, l’utilité de cette province. Car si vous devez à tous les alliés, à toutes les provinces et vos soins et votre intérêt, il n’en est pas qui y aient plus de droits que la Sicile. De toutes les nations étrangères, c’est la première qui se soit réfugiée dans l’amitié et dans la foi du peuple romain ; la première qui ait porté le nom de province, ce titre si honorable pour nous ; la première qui ait fait connaître à nos ancêtres la gloire de commander aux peuples