Page:Cicéron - Œuvres complètes, Garnier, 1850, tome 2.djvu/337

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Quelle ville y était donc obligée ? Le bail des censeurs détermine ce que doivent rendre à l’État les cultivateurs de nos domaines. Pourquoi leur avoir imposé des redevances d’un autre genre ? Aux termes de la loi d’Hiéron, les cantons soumis à la dîme doivent-ils autre chose que le dixième de leurs blés ? Pourquoi les avoir taxés aussi pour leur part du blé acheté par la république ? Certes les pays exempts ne doivent rien ; et cependant vous les avez imposés, même au delà de leurs moyens, en les surchargeant de soixante mille boisseaux dont vous aviez fait remise aux Mamertins. Je ne dis pas que vous ayez eu tort d’exiger des autres villes, mais je soutiens que vous avez mal fait d’exempter Messine, dont la cause était la même, à qui tous vos prédécesseurs avaient imposé cette obligation, et payé le prix réglé par le sénatus-consulte et par la loi. Afin d’affermir son bienfait sur une base solide, il examine l’affaire dans son conseil, et prononce que, de l’avis de son conseil, il n’exige point de blé des Mamertins.

Écoutez le décret de ce préteur mercenaire, tel qu’il est consigné dans son registre, et voyez quelle dignité règne dans la rédaction, et combien est imposante l’autorité par qui cette question a été décidée. Extrait du registre de Verrès. Il dit qu’il le fait avec plaisir. Ce sont les termes du décret. Sans ces mots, avec plaisir, nous aurions pu croire que c’est malgré lui qu’il gagne de l’argent. De l’avis de notre conseil. On vous a lu, citoyens, la liste des membres de ce conseil respectable : de bonne foi, pensiez-vous entendre alors les noms des assesseurs d’un magistrat, ou ceux des associés du plus infâme brigand ?

Voilà donc les hommes chargés d’interpréter les alliances, de saisir l’esprit des traités et d’en assurer les droits augustes et sacrés ! Avant que Verrès se fût adjoint ce conseil si éclairé, si bien choisi, pour se faire autoriser à recevoir l’argent des Mamertins, et à ne pas démentir son caractère, jamais la république n’avait acheté de blés en Sicile, que Messine n’eût fourni son contingent. Aussi le décret n’eut pas plus de durée que le pouvoir de l’homme qui avait vendu des exemptions à ceux dont il avait dû acheter les blés ; car à peine Métellus eut-il été installé dans la province, qu’ils furent taxés conformément au règlement et aux registres de Sacerdos et de Péducéus. Ils comprirent alors que c’est toujours faire un mauvais marché que d’acheter d’un homme qui n’a pas droit de vendre.

XXII. Dites-nous donc, scrupuleux interprète des traités, pourquoi avez-vous exigé du blé de Taurominium et de Nétum ? Ces deux villes sont nos confédérées. Il est vrai que les Nétiniens ne s’oublièrent pas. Dès que vous eûtes prononcé que vous faisiez avec plaisir cette remise aux Mamertins, ils vinrent à vous, et montrèrent que les conditions de leur alliance étaient absolument les mêmes. Dans une cause toute pareille, vous ne pouviez décider d’une manière différente. Vous prononcez que les Nétiniens ne doivent pas de blé : et cependant vous leur enjoignez d’en fournir. Lisez les registres du préteur et ses ordonnances concernant l’imposition et l’achat des blés. Ordonnances de Verrès concernant