Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/275

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citoyens, lorsqu’au milieu du trouble général, la terreur répandue parmi tous les gens de bien, les rendait, malgré eux, esclaves de votre tyrannie ; lorsque tous les tribunaux, toutes les lois ne servaient que vos caprices ; lorsque, violateur de la loi Porcia, vous nous enleviez la liberté, et vous proclamiez le seul arbitre de la vie et de la mort de chacun de nous. Mais c’est peu pour vous d’avoir commis ces attentats publics : en ne cessant de les rappeler, vous semblez accuser notre faiblesse ; vous ne voulez pas qu’on oublie son esclavage. Soyez content, Cicéron, soyez content de ce que vous avez fait ; c’est assez pour nous d’avoir passé par ces temps malheureux : pourquoi fatiguer nos oreilles de votre odieuse gloire ? pourquoi nous importuner de ces paroles :

Que Mars cède à la paix, les lauriers à l’olive ;

comme si, à cette époque dont vous êtes si fier, vous ne vous étiez pas fait précéder d’un fer assassin, plutôt que du signe chéri de la paix ; comme si, entre vous et le dictateur Sylla, on avait vu d’autre différence que celle du nom de la tyrannie.

Mais pourquoi m’étendre davantage sur votre insolence ? puis-je oublier que c’est Minerve elle-même qui vous a enseigné tous les arts, que Jupiter vous a admis dans le conseil des dieux immortels, que l’Italie vous a porté sur ses épaules à votre retour de l’exil ?

Dites-moi, Romulus d’Arpinum, supérieur par votre génie aux Pauls, aux Scipions, aux Fabius, quelle est votre place dans cette république ? quel est le parti que vous affectionnez le plus ? quel est votre ami ? quel est votre ennemi ? Vous voilà l’esclave de celui que vous vouliez faire périr dans Rome même. De quel droit,