Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/321

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les assauts de leur aveugle fureur. Veut-on attenter à ma vie ? je suis prêt. Veut-on m’exiler ? je pars sans avoir défendu ma cause. Ne veut-on point m’entendre ? je me tais. A-t-on d’autres projets ? qu’on les exécute. Rien ne me paraîtra trop dur, ni trop pénible à supporter, pourvu que la république y gagne le repos. Je ne suis pas vaincu, je me sacrifie au salut de Rome. La mort n’a rien d’affligeant quand on meurt pour son pays ; l’exil n’a rien de honteux quand il est le prix de la vertu, surtout lorsqu’on trouve dans ces peines plus d’un motif de consolation. En effet, si elles nous privent de la vie, elles ne peuvent nous enlever une gloire immortelle. Si mes ennemis condamnent ma personne à l’exil, ils ne sauraient détourner ma pensée de la république. Partout elle remplira mon cœur, elle sera toujours l’objet de ma sollicitude ; je me regarderai comme arraché à votre amour, et non comme exilé par vous. Romains, je vous le demande à tous avec instance, je vous en conjure, si, tant qu’il me fut permis d’habiter Rome, je n’ai jamais attaqué personne sans raison, ni causé le malheur d’aucun innocent ; si j’ai secouru et défendu mes concitoyens, si je leur ai servi de rempart contre leurs ennemis, prenez mes enfants sous votre protection, accordez-leur votre appui, ne souffrez pas que mes ennemis poursuivent plus longtemps ma famille ; et soit que je parte, soit que la haine termine ici mes jours, conservez du moins pour moi l’estime et les sentiments que l’on doit au courage, et non ceux qu’inspire le malheur.

X. Maintenant, ô Jupiter ! le meilleur et le plus grand des dieux, dont la volonté, dont l’autorité suprême, gouvernent le monde ; Junon, reine des cieux, toi son auguste épouse, qui partages sa puissance ; Minerve,