Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/399

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tiade, à Éphialte, à Cimon, à Thémistocle, à Aristide(7), ces chefs ou plutôt ces pères de leur république. Quelle a été la récompense de leur amour pour elle, de leur justice et de leur constante fidélité ? Ces grands hommes, si précieux à leur patrie, à qui on devait tout et pour qui on n’aurait pu trop faire, vous répondront qu’ils ont été, non pas seulement dépouillés de leurs dignités, mais envoyés en exil. Chez nos ancêtres, Scipion l’Africain(8), attaché au meilleur parti, fut trouvé mort dans son lit pour avoir résisté à l’ambition démesurée de quelques ambitieux, dont sa propre femme, sœur des Gracques, fut soupçonnée d’avoir été complice. Qui a jamais été plus à plaindre que ce Métellus Numidicus, l’homme de son siècle le plus grand et le plus illustre, qui aima mieux aller en exil que de jurer l’exécution d’une loi pernicieuse ? J’avouerai que de toutes les causes d’exil et de disgrâce, celle qui lui attira l’un et l’autre fut la plus honorable, puisqu’on ne saurait la rapporter qu’à sa probité, à son intégrité et à son amour pour la république. Mais il ne fut pas moins douloureux pour lui d’être chassé de sa patrie, arraché aux siens et obligé de voir le pillage de ses biens et la désolation de sa famille. Je passe sous silence M. Régulus, C. Marius et ce L. Brutus, qui fut tué en défendant la liberté de Rome. Ce serait perdre le temps que de faire l’histoire de pareils personnages : ils sont assez connus par nos livres, par leurs portraits et par leur propre réputation.

Quelque nombreux et quelque touchants que soient ces exemples, je vois quelque chose de plus triste encore dans la situation d’un homme qui, pour s’élever aux dignités, est dans la nécessité de les briguer, et qui dépend des suffrages du peuple. Que d’alarmes, que