Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/451

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qui suivirent sa retraite, scènes déplorables de fureur et de crime, toutes les atrocités qui accompagnèrent son retour sanguinaire dont le récit nous fait encore frémir ; car nous nous souvenons encore, ou du moins nous avons, dans les écrits de nos pères, des preuves récentes du massacre qui se fit alors d’une multitude d’hommes vertueux, d’excellents citoyens, enfin de la triste destinée de ces orateurs qui avaient défendu par la force de leur éloquence la vie et l’honneur de leurs concitoyens, et dont les têtes furent coupées et placées sur la tribune aux harangues. Combien en pourrions-nous compter d’autres également recommandables par leur mérite et leur vertu, qui pendant ces temps orageux se donnèrent volontairement la mort pour éviter de plus grands maux, et pour sauver leur liberté ! O malheureuse Rome ! qui ne plaindrait point ton sort, en voyant tes propres conservateurs, tes protecteurs et tes soutiens continuellement en péril, obligés de se tenir toujours en garde contre la perfidie et la trahison, et ne craignant rien plus que la cruauté même de leurs parents, sans que les citoyens qu’ils avaient sauvés, témoins de leur infortune et de tant d’horreurs, pussent ou osassent leur prêter aucun secours ? Pourrait-on ne pas convenir que, même pour ceux qui étaient forcés d’être spectateurs de tant de maux, la mort ne fût plus à désirer qu’à craindre ? et que d’autres, à qui elle en épargna la vue, n’aient été très heureux ? Tel a été L. Crassus : si les faits mêmes ne démontraient pas cette vérité, tous les discours qu’on pourrait employer pour la prouver seraient inutiles.

Mais ces événements sont déjà trop éloignés de nous pour que tous les hommes d’aujourd’hui puis-