Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/471

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venture, et que les bons, dont les plus longs et les plus rudes travaux ne finissaient que par une mort douloureuse, méritaient d’être traités autrement que les méchants, dont l’esprit et les pensées sont toujours tournés au mal, ne leur avaient assigné ni la même issue de la vie, ni le même salaire après la mort.

Cette réflexion doit me rassurer et me consoler surtout, moi, qui sais que ma chère fille, qui m’a donné tant de satisfaction par ses vertus et son amour, a vécu de manière qu’il n’était pas possible de rien ajouter à la bonté de son caractère et à la sagesse de sa conduite, et que dans la maladie qui l’a emportée à la suite d’une couche, elle a montré une grandeur de courage et une fermeté d’âme fort au-dessus de son sexe. Si la douleur que m’a causée sa perte n’a pas entièrement cessé, elle est du moins assez diminuée pour que je trouve du plaisir à m’entretenir d’elle, bien loin qu’il m’en reste quelque amertume. En pourrait-il être autrement, puisqu’il ne lui est réellement survenu aucun mal, et que je dois, moins que personne, me chagriner ou me troubler d’un événement qui est si conforme à la nature, et qui a une connexité si étroite avec l’humanité ? Que me reste-t-il donc à faire à présent que par la faveur divine elle a fourni sa carrière ? Rien autre chose que de tourner toutes mes pensées vers la vie heureuse et immortelle, dont je crois, ou plutôt dont je suis persuadé, qu’elle jouit actuellement ; et je recueillerai alors de cette idée une consolation d’autant plus grande, que l’état dans lequel je me la représente est sans comparaison beaucoup meilleur que celui dans lequel elle était pendant le cours de sa vie. De quels biens, en effet, ne s’est-elle pas rendue digne, elle qui ne fit jamais de mal, et ne pensa jamais à en faire ; elle qui a