Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/473

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

supporté le mal qu’on lui a fait pendant sa vie avec une si noble égalité d’âme, qu’elle ne remerciait pas moins sincèrement les dieux immortels des mauvais succès que des bons ; elle enfin qui, n’ayant pour objet dans toutes ses actions que le juste et l’honnête, se contentait du témoignage de sa conscience sans chercher à faire apercevoir ses précieuses qualités, sans même croire mériter pour cela ni louange ni gloire ? Une aussi belle âme, une âme aussi détachée d’elle-même, aussi soucieuse pour autrui de la droiture et de l’équité, aurait-elle pu manquer d’être très agréable aux dieux, et de les avoir pour elle ? pour elle, dis-je, en qui brillait, non le fard ou le coloris d’une vertu feinte, telle qu’on la voit dans plusieurs, mais l'image vivante de la véritable, et son empreinte la plus ressemblante ! Ce n’était pas assez pour elle que la nature lui eût donné un tel caractère, qu’elle suivait d’elle-même et par attrait les impressions de l’honnêteté et de la justice ; elle était parvenue, par la force de sa raison et par ses réflexions, à paraître n’avoir aucun besoin que son inclination la guidât, ni que sa nature lui fît entendre sa voix. En examinant donc de près sa conduite et ses mœurs, son habileté à régler ses affaires domestiques, son esprit qui s’étendait à tout, et son profond savoir, on aurait trouvé en elle l’intelligence et le jugement de l’homme le plus sage, l’habileté d’un père de famille, la fermeté et la prudence qui nous manquent souvent à nous-mêmes. Elle était si abondamment pourvue de toutes ces qualités, qu’il ne lui fallait aucun secours étranger pour se consoler dans ses infortunes, et qu’elle se suffisait à elle-même, parce qu’elle trouvait tout dans les ressources que lui fournissait son esprit. Et comme les maladies