Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/479

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diverses reprises, et l’achève dans un seul instant. Que si l’on trouve quelque chose de surprenant dans cette activité, combien doit paraître plus merveilleuse encore la facilité avec laquelle ce même esprit garde le souvenir de tant de choses qui se sont passées je ne sais combien de siècles auparavant, se rend l’avenir présent par la pensée, et tâche d’embrasser tous les temps et de les soumettre à ses regards, comme le fait Dieu même ! Comme on ne peut douter qu’il n’en soit ainsi, et qu’il n’est personne qui ne reconnaisse en soi-même cette faculté, on ne saurait douter non plus que l’âme ne soit divine, et que, si ce qui est divin est immortel, l’âme ne le soit aussi, son éternité pouvant se démontrer par deux choses essentielles qui lui sont particulières, savoir, le principe et la perpétuité du mouvement. En effet, l’âme se mouvant d’elle-même sans être mue d’ailleurs, comme tous les objets qui remplissent l’univers, et la perpétuité de son mouvement, tant qu’elle est dans le corps, étant palpable jusque dans ceux qui dorment, il s’ensuit nécessairement que l’âme est divine, et que sa durée n’aura point de fin : la raison le veut ainsi, et la force même des choses nous oblige d’en convenir.

L’âme est l’image de Dieu, émanée et sortie de Dieu même. Dieu est immortel. Voudrait-il qu’une partie qu’il a lui-même détachée de sa substance fût mortelle ? Croyons, au contraire, qu’il n’a que mieux manifesté sa toute-puissance, en rendant ceux qu’il lui a plu participants de sa nature et immortels comme lui. Dieu a voulu que le corps fût mortel, par la raison que, tirant son origine de la terre, qui, par elle-même, est sujette à de nombreux changements, il doit les éprouver comme elle, et revenir à elle après avoir fourni cette carrière