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Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/503

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bles, et qui ne se permet rien, pas même dans ses pensées, qui ne soit conforme à la piété, à l’humanité, en un mot, à la vertu. Et nous ne voyons, après tout, point de cause plus marquée de l’erreur et de l’ignorance, d’où tous les désordres tirent leur origine, que l’indifférence que nous avons pour nos principaux devoirs, tels que sont la piété envers les dieux, la bienveillance pour les hommes, et l’amour de la vertu empreint dans les esprits comme dans les mœurs. Nous ne nous contentons pas de négliger ces qualités précieuses ; nous courons après les défauts contraires, que nous devrions éviter, et nous nous y portons avec une ardeur et une impétuosité qui nous feraient prendre pour des brutes et pour des animaux cruels. De cette source dérivent des cupidités insatiables qui ont opéré la ruine, non de quelques particuliers, mais de plusieurs familles et de villes entières. Ajoutez à cela les séditions, les embûches, les discordes, les meurtres et la destruction, des biens ainsi que des hommes, sans compter les alarmes et une infinité d’autres peines qui accompagnent ces subversions, et qui troublent la vie, l’inquiètent, la tourmentent, et y répandent la tristesse et l’amertume. Les gens de bien et les vrais amis de la vertu ne sont point exposés à ces désastres : soumis à la loi divine et ne présumant point d’eux-mêmes, ils se reposent de tout sur elle, et placent en elle toute leur confiance. Loin de faire tort à qui que ce soit, il n’est personne envers qui ils n’exercent leur libéralité, leur bienveillance, leur humanité. Ils ne se tourmentent de rien, ils ne désirent rien avec passion, grâces au soin qu’ils ont pris de réfréner toutes leurs inclinations vicieuses, et d’extirper de leur âme toutes les racines des cupidités. Ce sont donc ceux qui ont usé de la vie de manière à