Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/529

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être à jamais religieux et consacré. Je trouverai une consolation bien chère dans l’honneur qui vous sera décerné ; et si je retire quelque gloire de ma tendresse pour vous, cette gloire sera bien douce à mon cœur. Je ne pourrai entendre parler, ni me souvenir moi-même de rien qui me fasse plus de plaisir que les témoignages qu’on me rendra d’avoir rempli avec enthousiasme le devoir de père, et marqué d’une manière éclatante ma reconnaissance envers une fille à qui j’ai voué la plus vive et la plus religieuse tendresse, et que j’en ai jugée digne ; autorisé surtout par l’exemple tant de nos ancêtres que des autres peuples, qui ont été prodigues de ces honneurs à l’égard même d’étrangers qui leur avaient rendu de signalés services. Que si ces honneurs ont été accordés même à des animaux, comme on l’a fait pour plusieurs chez les Égyptiens, ce que certainement on n’aurait pas dû faire ; si la race de Cadmus, d’Amphitryon et de Tyndare(39) a dû être élevée aux honneurs célestes par la renommée, la même faveur vous est bien acquise, ô Tullia ! et j’emploierai tous mes soins à vous la faire obtenir. Oui, plein d’admiration pour vos vertus et votre génie, sûr de l’approbation des dieux immortels, après vous avoir placée dans leur assemblée céleste, je vous rendrai pour jamais vénérable dans l’opinion de tous les humains. Vous goûterez donc dans ce temple, que j’ai voué et consacré à la mémoire de votre nom et à votre culte, le plaisir d’être louée et invoquée ; et votre joie sera surtout de voir que j’aurai satisfait à ce que je vous devais, et que je me serai absolument soustrait au caprice impérieux et aux cruels assauts de la fortune. Vous savez avec quelle constance et avec quelle force d’esprit j’ai résisté à toutes les traverses qu’elle m’a suscitées en me faisant chasser de ma patrie et dépouiller de toute dignité ; vous savez qu’elle