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DES ÉDITEURS.

nombre d’exceptions près, de ne mettre aucun chiffre ou signe de renvoi en tête des passages qui ont donné lieu à des notes. Si le lecteur ne s’y sent pas arrêté, il passe outre, et nous n’avons pas du moins le tort de lui avoir donné un scrupule qu’il n’aurait pas eu de son propre mouvement. S’il a besoin d’être éclairé, il recourt aux notes rejetées à la fin de l’ouvrage, et il y trouve satisfaction.

Ce n’est pas par ce seul point, dont nous ne nous faisons d’ailleurs qu’un mérite négatif, que notre édition diffère d’une édition scientifique.

Par exemple, il paraîtrait monstrueux, dans une édition qualifiée de ce nom, qu’on n’y eût pas fait entrer les moindres fragments de l’auteur, ni donné place aux ouvrages apocryphes, reconnus pour tels par tous les savants, dont l’accord sur ce point devrait pourtant ôter tout scrupule.

Le caractère élémentaire de notre édition nous a mis fort à l’aise à cet égard. Ainsi, nous avons cru devoir en conscience laisser dans les grammairiens ou dans les scoliastes, d’où on les a extraits, des fragments du genre de ceux-ci : Deum fidem… Questus que mecum est… Comissura… Puncta… Poematorum… fragments qui ont appartenu à des discours ; ou d’autres, comme celui-ci : Antecellunt… qui a fait partie d’un des traités philosophiques : non que nous blâmions le soin religieux qui a rassemblé ces débris, ou que nous ne comprenions pas cette superstition, la plus innocente de toutes, pour les œuvres du génie. Mais nous ne croyons pas que ce soit un défaut de ne pas charger une édition de mots isolés, ou de lambeaux de phrases qui n’ont aucun sens hors de l’ouvrage dont on les a tirés ; ainsi en fait de fragments, ne donnons-nous que ceux qu’on ne retrouverait dans aucun des ouvrages de la collection, et n’en donnons-nous aucun qui n’offre un sens complet, soit qu’il s’agisse d’un fait, soit qu’il s’agisse de quelque pensée morale ou philosophique. Nous n’avons point à faire les affaires de l’espèce de curiosité un peu stérile qui s’attache à ces reliques, mais bien à appeler l’attention sur les ouvrages intacts, sur ces corps pleins de vie, auxquels les érudits ont le tort de préférer des membres dispersés, disjecti membra, pour l’honneur que leur en fait la restauration conjecturale.

Quant aux apocryphes, la superstition, à cet égard, nous parait une impiété : nous ne craignons pas de dire que nous en avons nettoyé notre édition. On n’y trouvera plus, par exemple, ce traité de la Consolation, attribué à tort, presque méchamment, perperam, à Cicéron, et qui n’est, ainsi que l’a très-bien prouvé M. J. V. Leclerc, qu’une mauvaise déclamation de quelque rhéteur médiocre des âges suivants. Mais à quoi bon alors le publier et le traduire ? La pieuse main du savant éditeur a respecté Cicéron jusque dans une méchante déclamation longtemps décorée de son nom. il