on a vu beaucoup d’accusés condamnés après une seule plaidoirie et de l’accusateur et du défenseur, après une seule audition de témoins ; et quoiqu’ils ne fussent pas chargés à beaucoup près de crimes aussi manifestes et aussi grands que ceux dont vous êtes convaincu ! Supposez que ce soit, non d’après la loi actuelle, qui est si rigoureuse, mais d’après l’ancienne, qui est plus douce, que vous ayez à vous défendre. J’accuserai, vous répondrez ; les témoins entendus, je laisserai les juges aller aux voix, et, quoique la loi autorise un plus ample informé, je suis sûr qu’ils rougiraient de ne pas prononcer à l’instant.
X. Sans doute on ne doit juger qu’après la cause instruite ; mais ne l’est-elle pas assez ? Ne cherchons pas à dissimuler, Hortensius, ce qui nous est souvent arrivé dans nos plaidoiries. Qu’est-ce qui s’en rapporte à nous dans ce genre de cause où il est question d’objets dérobés ou enlevés à force ouverte ? N’est-ce pas dans les pièces authentiques et dans la déposition des témoins que les juges vont chercher tous les éléments de leur conviction ? J’ai promis, dans la première action, de prouver jusqu’à l’évidence que C. Verrès avait, au mépris de la loi, volé quarante millions de sesterces(34). Eh bien ! aurais-je rendu les faits plus évidents, si je les avais racontés de la manière suivante : Dion, de la ville d’Halèse(35), avait un fils à qui, sous la préture de Sacerdos(36), un de ses parents légua une très riche succession ; toutefois il put la recueillir sans obstacle et sans contestation. Mais à peine Verrès eut-il mis le pied dans la province, que, par une dépêche envoyée à Messine, il manda Dion devant son tribunal, puis aposta ses calomniateurs à gage, pour requérir que la succession fût confisquée au profit de Vénus Érycine(37), et s’arrogea la connaissance de cette affaire. Je pourrais ensuite entrer