doute c’est par son dévouement passionné pour l’intérêt de la noblesse, c’est par esprit de parti qu’il s’est conduit ainsi, et il n’a point ouvertement volé le consul, l’armée, la province ; il ne s’est point enfui pour mettre en sûreté le vol le plus impudent. Oui, sans doute, on peut avoir des doutes sur ses motifs ; l’on peut supposer que C. Verrès, par éloignement pour les hommes nouveaux, a repassé vers les siens en se rangeant du côté de la noblesse, et que l’argent ne fut pour rien dans sa détermination. Voyons, au surplus, de quelle manière il a rendu ses comptes. Lui-même va nous apprendre les motifs de sa désertion ; c’est lui-même qui va se trahir.
XIV. Remarquez d’abord combien il est laconique : J’ai reçu, dit-il, deux millions deux cent trente-cinq mille quatre cent dix-sept sesterces. J’en ai donné pour la paye, pour les vivres, pour les lieutenants, les questeurs, la garde du prétoire(47), un million six cent trente-cinq mille quatre cent dix-sept. J’en ai laissé six cent mille à Rimini. Est-ce là rendre des comptes ? Est-ce ainsi que vous, Hortensius(48), que moi, que quelque autre que ce soit, nous en avons rendu ? Qu’est-ce à dire ? quelle impudence ! quelle audace ! Trouve-t-on rien de semblable dans aucun des comptes rendus par tant de fonctionnaires ? Ce n’est pas tout, ces six cent mille sesterces(49) dont il n’a pu désigner même un faux emploi, qu’il dit avoir laissés à Rimini ; ces six cent mille sesterces, reliquat de la somme dont il était dépositaire, Carbon ne les a point touchés, Sylla ne les a point vus, et ils n’ont point été reportés dans le trésor public(50). Il a choisi Rimini(51) plutôt qu’un autre endroit, parce que cette ville fut alors saccagée et mise au pillage. Il ne soupçon-