Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.7.djvu/155

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manqué en quelque chose, s’efforce de le retenir. Verrès, n’ayant à donner aucune raison plausible pour quitter son hôte, se voit forcé d’imaginer un autre moyen d’accomplir son infâme projet. Sous prétexte que Rubrius, les délices de son cœur, son ministre et son agent fidèle dans ces sortes d’affaires, n’à pas un logement convenable, il donne ordre qu’on le conduise chez Philodamus. Dès que Philodamus fut instruit de cette disposition, bien qu’il ne se doutât pas de l’outrage qu’on lui préparait à lui et à sa famille, il se rendit aussitôt auprès de Verrès ; il lui représenta qu’on lui imposait une charge qui lui était étrangère ; que, lorsque c’était son tour de donner le logement(108), il recevait pour hôtes des préteurs ou des consuls, mais jamais des gens de la suite des lieutenants. Verrès, tout entier à sa passion, ne tint aucun compte des remontrances de Philodamus, et Rubrius fut établi de force dans une maison qui devait être dispensée de le recevoir.

XXVI. Philodamus, dans l’impossibilité d’obtenir justice, ne se départit point cependant de sa politesse et de ses procédés ordinaires. Jaloux de conserver la réputation qu’il s’était acquise par son honnêteté et par ses égards officieux envers nos concitoyens, il ne voulut pas laisser apercevoir que c’était malgré lui qu’il avait reçu Rubrius dans sa maison ; il fait préparer un repas aussi splendide et aussi délicat que sa grande fortune le lui permettait, prie Rubrius d’inviter les personnes qui lui seront agréables, et ne demande que pour lui seul la permission de rester. Il porte l’attention jusqu’à envoyer son fils, jeune homme d’un très grand mérite, souper dehors chez un de ses parents. Rubrius invite les gens de la suite de Verrès, et celui-ci a bien soin de leur donner ses in-