Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.7.djvu/207

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magistrat qui voulût s’y conformer. Il n’y a jamais eu que vous dans le monde qui, non content de réformer la volonté des vivans, ayez annulé celle des morts. Vous-même avez supprimé cet article dans l’édit que vous publiâtes en arrivant en Sicile : votre intention était, s’il survenait fortuitement quelques cas semblables, de statuer d’après l’édit de Rome. Mais ce moyen de défense que vous vous imaginiez pour la suite, ne l’avez-vous pas détruit vous-même, en infirmant, dans votre édit provincial, votre propre autorité ?

XLIV. Et je ne doute pas, juges, que comme à moi, qui chéris tendrement ma fille, cet édit ne vous paraisse également injuste et cruel, à vous qui avez pour vos filles la même tendresse et la même bienveillance. En effet, quel bien plus précieux, quel gage plus cher avons-nous reçu de la nature ? quel objet plus digne de toutes nos affections, de toute notre sollicitude ? Homme insensible ! vous n’avez donc pas craint d’insulter à la cendre d’Annius ! vous n’avez pas craint de troubler ses mânes et ses froides reliques, en dépouillant ses enfants d’un patrimoine que leur avaient transmis et la volonté d’un père, et le droit naturel, et les lois ! Et pourquoi ? pour en gratifier celui qui devait vous en tenir compte. Ceux à qui nous faisons part de ces biens, de ces revenus(153) pendant notre vie, se les verront donc enlever par un préteur, quand nous ne serons plus ! Je n’accorderai, dit-il, ni la permission de me présenter une requête, ni la mise en possession(154). Vous dépouillerez donc une pupille de sa robe prétexte ? Vous lui arracherez les ornemens(155), non seulement de sa fortune, mais de sa condition ? Et nous sommes étonnés que les Lampasacéniens aient couru aux armes contre un pareil homme ! nous sommes étonnés