Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.7.djvu/27

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hommes pleins d’arrogance, qui m’embarrassent moins parce qu’ils sont nobles, qu’ils ne me servent parce qu’ils sont connus(31) : il feint d’espérer en leur appui, tandis qu’il prépare depuis long-temps quelque autre ressort secret(32). Juges, je vais exposer en peu de mots quels sont et son espoir et ses projets : mais apprenez d’abord quelle marche il a adoptée dès le commencement du procès. À peine revenu de sa province, il a traité pour d’énormes sommes du renvoi de son jugement. Cet infâme marché a subsisté avec toutes ses conditions jusqu’au moment de la récusation des juges(33). Après cette opération, où la fortune, en favorisant le peuple romain dans le tirage au sort, et où l’extrême attention que j’ai mise dans mes récusations, avaient renversé les espérances de Verrès et terrassé son insolence, le traité fut rompu. Tout réussissait selon nos vœux. Les tableaux où étaient inscrits vos noms, et l’organisation de ce tribunal, se trouvaient dans les mains de tout le monde : plus de notes, plus de couleur(34), plus de viles manœuvres dont on se fît une arme pour flétrir vos suffrages. Alors l’accusé, d’abord si fier, si triomphant, était devenu subitement si humble, si abattu, qu’il semblait condamné non-seulement dans l’esprit du peuple romain, mais même à ses propres yeux. Mais tout à coup(35), ces jours derniers, après la tenue des comices consulaires(36), on reprend avec des sommes plus considérables ses anciens projets ; on se sert des mêmes hommes pour tendre les mêmes pièges à votre honneur et à la fortune de tous les citoyens. Ces manœuvres, sénateurs, nous ont d’abord été révélées par des indices vagues et des témoignages incertains : mais une fois entrés dans la voie du soupçon, nous avons pénétré, sans nous égarer, jusque dans les détours les plus secrets de leurs intrigues.