Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.7.djvu/29

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VII. Hortensius, consul désigné, revenait du Champ-de-Mars à sa maison, accompagné d’une foule nombreuse qui lui faisait cortège. Par hasard C. Curion(37) rencontre cette multitude ; je le nomme ici par honneur(38), et sans aucune intention de l’offenser. Je rapporterai de lui ce que sans doute il n’a voulu cacher à personne, puisqu’il l’a dit ouvertement, publiquement(39), en présence de tant de monde. J’userai cependant de ménagement et de précaution, afin que l’on remarque que je n’oublie point les égards dus à son rang et à l’amitié qui nous unit. Près de l’arc de triomphe de Fabius(40) il aperçoit Verrès dans la foule, et lui adresse la parole pour le complimenter à haute voix, sans dire un mot à Hortensius lui-même, qui venait d’être nommé consul, ni aux parents et aux amis de celui-ci qui étaient présents. C’est avec Verrès qu’il s’arrête ; c’est Verrès qu’il embrasse, Verrès qu’il engage à bannir toute inquiétude. « Je vous déclare, dit-il, absous par les comices de ce jour. » Ce mot fut entendu par un grand nombre de citoyens honorables ; il me fut aussitôt rapporté : bien plus, il n’est personne qui, en me voyant, ne me le répétât. Aux uns, ce discours paraissait indigne ; aux autres, ridicule ; ridicule à ceux qui pensaient que la cause dépendait, non des comices consulaires, mais du poids des témoignages, de la nature des crimes, de la conviction des juges ; indigne à ceux qui, portant leurs vues plus haut, voyaient dans ces félicitations l’espoir de corrompre les juges. C’est ainsi que ces hommes intègres raisonnaient et s’entretenaient entre eux et avec moi : « Il est clair, il est évident qu’il n’y a plus de justice. Celui qui se croyait condamné la veille, est absous le lendemain, parce que son défenseur est nommé consul. Quoi ! toute la Sicile, tous les Siciliens, tous les commer-