Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.7.djvu/421

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par leurs suffrages : l’argent, grâce à Verrès, la rendit facile à obtenir.

L. Les Agrigentins ont, pour la formation de leur sénat, les anciens règlemens de Scipion, dans lesquels non-seulement sont portées les mêmes dispositions, mais d’autres encore. Il y a deux races distinctes d’Agrigentins, d’abord celle des anciens habitans, puis celle des colons, que le préteur T. Manlius (85), en vertu d’un sénatus-consulte, conduisit à Agrigente des différentes villes de la Sicile. Scipion veilla soigneusement à ce qu’il ne se trouvât pas dans le sénat plus de colons que d’anciens habitans. Verrès, aux yeux de qui l’argent rendait tout égal, et l’or faisait disparaître toute différence, toute distinction, ne confondit pas seulement les conditions d’âge, de rang, et de profession pour l’éligibilité, il perdit même de vue la distinction des deux races pour l’ordre et le choix des anciens et des nouveaux habitans. Lorsqu’un sénateur du nombre des anciens était mort, et que les deux races se trouvaient en nombre égal, les lois voulaient que l’on choisît un ancien, afin que cette classe eût la majorité. Dans cette conjoncture, beaucoup de candidats de l’ancienne et de la nouvelle race se présentèrent pour acheter la place vacante. Ce fut un nouvel habitant qui l’emporta. Il avait mieux payé ; le préteur lui expédia aussitôt les provisions. Les Agrigentins envoyèrent à Verrès une députation pour l’informer de leurs lois, et lui remontrer que de tout temps elles avaient été observées. Ils espéraient lui faire sentir qu’il avait vendu la place à un homme qui même n’aurait pas dû entrer en négociation pour cet objet. Verrès avait reçu l’argent, et tous leurs frais d’éloquence furent inutiles. Il fit la même chose à Héraclée, où P. Rupilius avait aussi fondé une colonie, et réglé d’une manière analogue l’élection des sénateurs, et