neurs et vos distinctions. Oui, la chose est croyable, des hommes qui ne veulent pas même vous laisser vivre dans votre propre ville, ont désiré conserver dans leurs murs des monumens de vos traits et de votre gloire ! Les faits ont prouvé combien ils le désiraient : car c’est trop longtemps m’arrêter à rassembler des preuves minutieuses pour apprécier les véritables intentions des Siciliens, pour établir si c’est librement ou par contrainte qu’ils vous ont élevé des statues. De quel autre a-t-on jamais entendu dire ce qui vous est arrivé, qu’en une province, ses statues, érigées dans tous les lieux publics, et jusque dans les temples saints, aient été renversées avec violence par tout un peuple ameuté ? Combien a-t-on vu de magistrats coupables, en Asie, en Afrique, en Espagne, en Gaule, en Sardaigne, et même en Sicile ! Et cependant en est-il un seul dont nous ayons entendu rapporter un fait semblable ? La chose est sans exemple, juges ; et de la part des Siciliens, comme de tous les autres Grecs, elle tient du prodige. Non, je ne le croirais pas, si mes yeux n’avaient vu ces statues arrachées de leur base, couchées sur la poussière ; car les Grecs, d’après leurs principes, regardent ces monumens comme une consécration qui associe, en quelque sorte, l’homme aux dieux immortels. Aussi, dans la première de nos guerres contre Mithridate (104), que les Rhodiens soutinrent presque seuls, alors que toutes le troupes et les attaques impétueuses de ce monarque menaçaient leurs murs, leurs rivages, leur flotte, et qu’eux-mêmes se montraient ses ennemis les plus acharnés, ils s’abstinrent, au plus fort des périls dont ils étaient investis, de toucher à sa statue qui se trouvait au milieu d’eux, dans le lieu le plus fréquenté de leur ville. Peut-être paraîtra-t-il peu conséquent de leur part d’avoir conservé l’effigie, le
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