Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.8.djvu/195

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mal payé lui en avait coûté trois cent mille (55) ! Vainement lui a-t-on répondu que le succès de Verrès était impossible, que plusieurs témoins étaient prêts à déposer, que d’ailleurs je ne me prêterais à aucun arrangement. « Bon, s’est-il écrié, tous ils pourront tout dire contre lui. À moins qu’ils ne rendent le fait si évident qu’il soit impossible de répondre, la victoire est à nous. » Rien de mieux, Alba : j’accepte vos conditions. Vous pensez que les tribunaux ne doivent tenir aucun compte ni des conjectures, ni des présomptions, ni de ce que doit faire préjuger la vie antérieure, ni du témoignage des honnêtes gens, ni des dépositions des villes, quelle que soit leur authenticité ; vous demandez des preuves par écrit, qui ne laissent aucun doute. Moi, je ne demande point de juges à la façon de Cassius ; je n’invoque pas l’antique sévérité de nos tribunaux ; ce n’est ni votre loyauté, ni votre honneur, ni votre conscience, que j’implore dans cette cause ; je ne veux d’autre juge qu’Alba, oui, que cet homme qui vise à la réputation de mauvais bouffon, et que les bouffons eux-mêmes ont toujours regardé plutôt comme un vil gladiateur que comme un vrai bouffon. Je vous présenterai l’affaire des dîmes dans un si grand jour, qu’Alba lui-même avouera que, pour ce qui concerne les blés et les propriétés des laboureurs, des brigandages ont été ouvertement, publiquement commis.

LXIII. Verrès prétend qu’il a vendu cher la dîme du canton de Leontium. J’ai démontré que ce n’est pas vendre fort cher que de vendre seulement en paroles, tandis qu’en effet l’on s’arrange pour que les conventions, les lois, les édits, le despotisme des décimateurs, ne laissent pas même aux cultivateurs les dîmes de leur récolte. J’ai démontré pareillement que vos prédécesseurs avaient vendu cher