Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.8.djvu/365

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du préteur, et que l’absence n’était point une garantie contre ses poursuites criminelles. Diodore était à Rome ; vêtu d’habits de deuil, il courait chez ses patrons et chez ses hôtes ; à tous il racontait sa disgrâce. Le père de Verrès écrit à son fils dans les termes les plus énergiques ; ses amis l’avertissent avec la même chaleur de songer à ce qu’il allait faire, qu’il prît garde de se compromettre avec Diodore, que la vérité était connue, qu’on était indigné contre lui, qu’il faisait une folie, enfin que, s’il n’y prenait garde, il n’en faudrait pas davantage pour le perdre. Si dès ce temps Verrès ne respectait déjà plus son père comme l’auteur de ses jours, il avait du moins pour lui les égards qu’on se doit d’homme à homme : d’ailleurs il ne s’était pas encore mis en mesure contre la justice. C’était la première année de sa préture en Sicile, il ne regorgeait pas encore d’argent comme au temps de l’affaire de Sthenius. Il mit donc un frein à sa fureur, moins par honte du crime que par crainte du châtiment ; il n’osa condamner Diodore ; et, en raison de son absence, il le raya de la liste des accusés. Mais Diodore, pendant les trois années de la préture de Verrès, se garda bien de reparaître dans la province, et se tint éloigné de sa maison.

XX. Le reste des Siciliens, ainsi que les citoyens romains établis dans la province, voyant à quels excès Verrès était capable de se laisser entraîner par ses impétueuses fantaisies, avaient pris leur parti avec résignation, convaincus qu’il n’y aurait pour eux aucun moyen de posséder, de conserver dans leurs maisons rien de ce qui pourrait lui plaire. Mais, quand ils surent qu’un vertueux magistrat, attendu par toute la province avec impatience, Q. Arrius, ne lui succéderait pas (46), c’est alors qu’ils