Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.8.djvu/443

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mérité de porter la main sur des objets sacrés, dont la religion vous commandait de détourner vos regards ! On ne dira pas que vos yeux ont été séduits lorsque vous commîtes une impiété si criminelle, si exécrable ; car vous avez convoité ce que vous n’aviez pas vu ; oui, votre cœur a désiré ce que vos yeux n’avaient point encore aperçu : un simple ouï-dire a pu allumer dans votre âme une passion si furieuse, que, ni la crainte, ni la religion, ni la puissance des dieux, ni l’opinion des hommes, n’ont été capables de la modérer. Et qui donc vous avait si bien instruit ? Quelque honnête homme apparemment, et d’une autorité non suspecte. Comment cela, puisque nul homme n’a pu vous parler de cette statue ? C’est donc une femme qui vous a révélé l’existence de ce gage mystérieux, les hommes n’ayant jamais pu ni le voir ni le connaître. Or, je vous le demande, juges, quelle idée pouvez-vous avoir d’une telle femme ? Que penser de sa vertu, quand elle s’entretient avec Verrès ; de sa piété, quand elle lui indique les moyens de spolier un temple saint ? Ces mystères exigent la chasteté la plus pure dans les vierges et les épouses qui les célèbrent. Faut-il s’étonner que cet infâme ait fait servir à leur profanation l’adultère et la débauche ?

XLVI. Est-ce donc la seule chose, dont, sur un simple ouï-dire, il ait voulu s’emparer, même sans l’avoir vue ? Il y en a mille autres ; et parmi une foule de traits, je choisirai le pillage d’un temple très-célèbre et très-ancien. Vous avez entendu ce que les témoins ont dit sur ce fait dans la première action ; je vais vous le rappeler : continuez-moi, je vous prie, toute votre attention.

Malte est séparée de la Sicile par un détroit assez