Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.8.djvu/457

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cette ville ; mais ils étaient bien moins esclaves de leurs maîtres que vous de vos passions ; ils étaient bien moins rebelles à la servitude que vous aux lois et à la justice ; ils étaient moins barbares par leur langage et leur patrie que vous par votre caractère et par vos mœurs ; bien moins armés contre les hommes que vous contre les dieux immortels. Quelle indulgence peut donc attendre un brigand qui s’est montré plus vil que des esclaves, plus téméraire que des rebelles, plus impie, plus brutal que des barbares, plus cruel que des ennemis acharnés ?

LI. Vous avez entendu Théodore, Numinius et Nicasion, députés d’Enna, vous dire, au nom de leur ville, que leurs concitoyens les avait chargés de se rendre auprès de Verrès, et de lui redemander leurs statues de Cérès et de la Victoire. S’il consentait à les rendre, les habitans d’Enna, fidèles à la pratique constante de leur ville, devaient, malgré toutes les vexations que la Sicile pouvait reprocher à Verrès, s’abstenir de déposer contre lui, et suivre en cela l’exemple de leurs ancêtres. Si au contraire il refusait de restituer, ils avaient ordre de se joindre aux autres accusateurs, de dénoncer aux juges ses injustices envers eux, et de se plaindre particulièrement de ses attentats sacrilèges. Ils se sont plaints, juges ; mais, au nom des dieux immortels, n’allez pas ici vous montrer indifférens, froids, insoucians : il s’agit des injures faites à nos alliés, il s’agit de l’autorité des lois, il s’agit de l’honneur et de l’équité des tribunaux. Ces intérêts sont grands sans doute, mais il en est un plus grand encore. Telle est la vénération des Siciliens pour Cérès, le sacrilège dont je parle a tellement frappé leur imagination, que toutes leurs calamités, ou publiques