Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.8.djvu/477

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à la religion des peuples, cette image à laquelle les habitans de Syracuse, citoyens ou domiciliés, rendaient un culte particulier, que les étrangers s’empressaient non-seulement d’aller voir, mais d’adorer, Verrès l’a enlevée du temple de Jupiter.

J’aime à vous rappeler le nom de Marcellus. Sachez, juges, que le séjour de Verrès à Syracuse a coûté plus de dieux à cette ville que la victoire de Marcellus ne lui a fait perdre de citoyens. On dit même que ce héros fit chercher l’illustre Archimède, cet homme supérieur par son génie et par son savoir ; mais, apprenant qu’il venait d’être tué, il en ressentit un vif chagrin. Quant à Verrès, toutes les recherches qu’il a fait faire ont eu pour but, non de conserver, mais de piller.

xx LIX. Il est encore d’autres larcins qui vous paraîtraient de trop peu d’importance, si j’en parlais en ce moment. Je les passerai donc sous silence. Je ne dirai pas qu’il a enlevé dans tous les temples de Syracuse et leurs tables Delphiques (90) en marbre, et de très-belles coupes d’airain, et une immense quantité de vases de Corinthe. Aussi les mystagogues (91), ainsi l’on appelle ceux qui mènent les étrangers voir ce qu’il y a de curieux, font présentement un métier tout nouveau. Autrefois ils montraient les choses mêmes, aujourd’hui ils montrent la place qu’elles occupaient. Eh quoi ! pensez-vous que cette spoliation ait médiocrement affecté les Syracusains ? Non, juges, il n’en est pas ainsi. Tous les hommes en général sont attachés à leur culte, tous se font un devoir d’honorer et de conserver soigneusement les dieux de leurs pères ; mais les Grecs, particulièrement, se passionnent, avec excès peut-être, pour tout ce qui est ornement, objet d’art, statue, tableau. La vivacité de leurs