Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.8.djvu/59

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fermiers doivent rendre huit fois la valeur, le laboureur n’est tenu qu’à restituer le quadruple. Qui oserait dire que Verrès s’est montré le persécuteur, l’ennemi des laboureurs ? Combien n’a-t-il pas plus d’indulgence pour eux que pour les publicains ! Il a ordonné que, toutes les fois qu’un décimateur aurait déclaré ce qu’il croirait lui appartenir, le magistrat sicilien contraindrait le laboureur à le lui livrer. A-t-il négligé aucune action judiciaire qui pût être autorisée contre le laboureur ? Ce n’est pas un mal, dit-il, d’entretenir la terreur ; il est bon que, lorsqu’on aura fait contribuer le laboureur, la crainte des tribunaux l’empêche de remuer. Si vous voulez me faire payer en vertu d’un jugement, ne faites pas intervenir un magistrat sicilien (14) ; si vous employez la violence, qu’est-il besoin d’une sentence juridique ? Et, d’ailleurs, qui n’aimera pas mieux donner à vos collecteurs ce qu’ils auront demandé, que d’être condamné par vos acolytes à payer le quadruple ?

XIV. Admirons vraiment la conclusion de son édit. Il annonce que, dans tous les débats qui s’élèveront entre le laboureur et le décimateur, il nommera des commissaires, si l’un des deux le souhaite. D’abord quelle discussion peut-il y avoir quand celui qui doit demander enlève, et qu’il enlève non pas seulement ce qui lui est dû, mais tout ce qui est à sa convenance ; quand, d’un autre côté, il n’est aucun moyen possible au malheureux qu’on dépouille pour rien recouvrer du sien en vertu d’un jugement ? Puis notre homme, prétendant, de son bourbier, s’élever jusqu’à la finesse et jusqu’à la ruse, ajoute : Si l’un des deux le souhaite, je nommerai des commissaires. Ô l’heureux moyen de voler adroitement ! À tous deux il accorde la faculté de réclamer des commissaires. Mais