Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.9.djvu/117

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excellente voilure ; car, pendant la préture de Verrès, il n’a pas été possible de savoir le chemin que pouvait faire un vaisseau à l’aide de rames. Cependant le vaisseau de Centorbe, par considération pour Cléomène, n’avait pas été entièrement dégarni de rameurs et de soldats. Il était déjà bien loin et hors de vue, que les autres travaillaient encore à se mettre en mouvement.

Le courage ne manquait pas au reste de la flotte. Malgré leur petit nombre, tous ceux qui la montaient voulaient combattre, quoi qu’il pût arriver ; tous le demandaient à grands cris ; et, puisque la faim leur avait laissé quelque reste de force et de vie, c’était du moins sous le fer ennemi qu’ils voulaient le perdre. Si Cléomène ne s’était pas enfui avec tant de précipitation, la résistance n’aurait pas été impossible. Son vaisseau, le seul qui fût ponté, était d’assez haut bord pour servir de rempart à toute l’escadre ; dans un combat contre des corsaires, il aurait paru comme une citadelle au milieu de leurs chétifs brigantins (63*). Mais, dénués de tout, abandonnés par leur chef, les Siciliens cédèrent à la nécessité, et le suivirent.

Tous voguaient donc vers Élore (64), ainsi que Cléomène, moins pour éviter le choc de l’ennemi que pour suivre leur amiral. Celui qui restait le plus en arrière se trouva le plus en danger ; aussi le dernier navire fut-il le premier que les pirates attaquèrent. Le vaisseau d’Haluntium tomba d’abord en leur pouvoir. Il était commandé par Philarque, citoyen très-considéré dans leur ville, et que, depuis, les Locriens (65) ont racheté aux dépens de leur trésor. C’est lui qui, dans la première action, vous a développé tous les détails de cette affaire. Le vaisseau d’Apollonie fut pris le second ; son capitaine, nommé Anthropinus, perdit la vie.