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Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.9.djvu/125

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Héracléon, avec quatre misérables brigantins, a vogué impunément au gré de ses désirs. Dieux immortels ! l’autorité, les faisceaux, la souveraineté du peuple romain, étaient dans Syracuse, et un corsaire s’est avancé jusqu’au forum, il a côtoyé tous les quais d’une ville dont les flottes redoutables des Carthaginois, alors maîtres de la mer, ne purent jamais approcher, en dépit de tous leurs efforts dans maintes expéditions ! Que dis-je ? nos forces navales, invincibles jusqu’à votre préture, Verrès, n’ont pas moins vainement tenté de franchir cette barrière, au milieu de tant de guerres puniques et siciliennes. Telle est en effet la nature du lieu, qu’avant de voir un vaisseau ennemi dans leur port, les Syracusains verraient plus tôt une armée victorieuse dans leurs remparts, dans leur cité, dans leur forum. Vous étiez préteur, et des barques de pirates ont vogué librement dans une enceinte dont, de mémoire d’homme, la seule flotte athénienne, composée de trois cents voiles et d’innombrables équipages, avait forcé l’entrée ; encore trouva-t-elle sa défaite dans ce port même ! Oui, c’est là que cette ville célèbre vit pour la première fois sa puissance vaincue, affaiblie, humiliée ; c’est dans ce port que sa renommée, sa prépondérance, sa gloire, firent un commun naufrage (70).

XXXVIII. Un pirate aura pénétré là où il ne pouvait arriver sans laisser, non-seulement à côté de lui, mais derrière lui, une grande partie de la ville ! Il aura fait le tour de l’île dans toute son étendue ; de cette île qui, séparée du reste de la ville par la mer et par ses murailles, forme pour ainsi dire une autre cité dans Syracuse ; de cette île où nos ancêtres ont, comme je l’ai dit,