Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.9.djvu/159

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l’avaient placé au premier rang. Et Dexion, il ne vient pas non plus réclamer ce que vous avez pris soit à la ville de Tyndaris, soit à lui-même ; mais son fils, unique gage de sa tendresse ; son fils innocent et vertueux, voilà ce qu’il réclame. Ce ne sont point les restitutions et dommages qui vous seront imposés qu’il veut emporter avec lui, mais bien votre condamnation capitale, comme une consolation pour les mânes de son fils (83). Enfin Eubulide, que vous voyez courbé sous le poids des années, n’a pas entrepris, au terme de sa vie, un si long et si pénible voyage pour recueillir quelques débris de sa fortune, mais pour que ses yeux, qui ont vu la tête sanglante de son fils, deviennent enfin témoins de votre supplice.

Si L. Metellus l’eût permis, juges, et les mères, et les femmes, et les sœurs de ces déplorables victimes seraient ici présentes. L’une d’elles, lorsque j’arrivai de nuit à Héraclée, l’une d’elles vint au devant de moi, à la lueur d’un grand nombre de flambeaux, accompagnée de toutes les respectables matrones de cette ville. Je l’ai vue prosternée à mes pieds ; elle m’appelait son sauveur, et vous, Verrès, son bourreau. Mon fils ! mon fils ! s’écriait elle, comme si j’avais pu lui rendre son fils, et le rappeler des enfers. Partout les vieillards et les enfans sollicitaient le secours de mon zèle, tous imploraient et votre justice et votre humanité.

Voilà, juges, voilà les plaintes que la Sicile m’a recommandé surtout de vous faire entendre. Ce sont les larmes de cette province, et non un vain désir de gloire, qui m’ont conduit devant vous. J’ai voulu qu’une injuste condamnation, la prison, les chaînes, les verges, les haches, les tor-