Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.9.djvu/29

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de l’accusé. Voyez combien je suis loin d’apporter dans cette cause les dispositions d’un ennemi. Il est un fait dont Verrès a désiré que vous fussiez instruits, et dont vous n’avez jamais entendu parler ; c’est moi qui vais vous l’apprendre et vous le révéler. Dans le canton de Triocale (9), qui fut autrefois au pouvoir des fugitifs, les esclaves d’un Sicilien nommé Léonidas furent soupçonnés de conspiration. Le préteur en fut averti. Aussitôt, comme il le devait, il fait arrêter et conduire à Lilybée ceux qu’on lui avait dénoncés. Leur maître fut assigné, le procès s’instruisit ; ils furent condamnés.

V. Qu’arriva-t-il ensuite ? Devinez. Vous vous attendez peut-être à quelque escroquerie (10), à quelque vol à force ouverte. Ne croyez pas qu’on ait toujours les mêmes faits à produire. Dans les alarmes d’une guerre imminente, peut-on songer à voler ? Je ne sais si, dans cette circonstance, il en a trouvé l’occasion ; ce qu’il y a de certain, c’est qu’il l’a négligée. Cependant il pouvait tirer quelques écus de Léonidas quand il le somma de comparaître. Il y avait aussi, pour que la cause fût remise, quelque marché à faire, et ce n’aurait pas été le premier. C’était encore une bonne aubaine que d’absoudre les accusés. J’en conviens ; mais ces malheureux une fois condamnés, il n’y avait plus moyen de rien extorquer. Il faut absolument qu’on les mène à la mort, car Verrès a pour témoins et les membres du tribunal, et les pièces du procès, et Lilybée, et tant d’honorables citoyens romains domiciliés dans cette ville opulente. Non, il n’y a pas moyen d’éluder ; l’exécution est indispensable. Les voilà donc conduits sur la place, les voilà attachés au poteau.

Il me paraît, juges, que vous êtes impatiens d’apprendre le dénouement de cette scène ; car cet homme